Une start-up israélienne dévoile son lanceur électromagnétique pour envoyer des charges dans l’espace.
Moonshot, dirigée par une ancienne du Dôme de fer, développe un lanceur hypersonique permettant d’envoyer en orbite des charges utiles petites à moyennes à moindre coût d’ici 5 ans.
Une start-up israélienne cherche à développer un système de lancement électromagnétique à haute puissance conçu pour propulser des charges utiles et permettre la livraison de marchandises dans l’espace à une vitesse hypersonique, en utilisant de l’électricité plutôt que des combustibles chimiques.
La société Moonshot Space, qui est basée à Césarée, a levé le voile lundi sur ses activités, annonçant avoir levé 12 millions de dollars pour construire un système de lancement qui utilise l’accélération électrique au lieu de la propulsion chimique traditionnelle des fusées et des coûteux missiles pour envoyer des charges utiles à des vitesses hypersoniques, permettant de livrer des matières premières et des fournitures dans l’espace à un coût nettement moindre.
Moonshot a été fondée en 2024 par Hilla Haddad Chmelnik, ancienne directrice générale du ministère des Sciences et membre de l’équipe qui a développé le système antimissile du Dôme de fer, Fred Simon, cofondateur de la licorne logicielle JFrog, et Shahar Bahiri, cofondateur de la société de mobilité intelligente basée sur l’IA Valerann.
Moonshot est l’une des nombreuses start-ups, en Israël et dans le monde, qui travaillent sur l’utilisation d’impulsions électromagnétiques pour faire accélérer une charge utile à des vitesses capables d’échapper à l’attraction gravitationnelle de la Terre. La plupart des conceptions utilisent des concepts de canons électromagnétiques ou de canons à bobine à haute énergie cinétique – qui sont également développés à des fins militaires, un secteur dans lequel Moonshot fait également son entrée.
« L’exploration spatiale devient de plus en plus diversifiée et complexe pour ce que nous voulons faire en matière de science, de fabrication et d’exploitation minière. Et, comme pour toute industrie en pleine évolution, il faut disposer de plus d’un seul mode de transport, une fonction assurée pour l’instant via des fusées chimiques et bien trop onéreuse », a déclaré Haddad Chmelnik au Times of Israel. « Si le concept de lancement cinétique d’un vaisseau spatial existe depuis l’époque de Jules Verne, aujourd’hui, les technologies, les énergies renouvelables et la puissance de calcul nécessaires pour rendre un lancement cinétique abordable et réalisable sont également disponibles. »
La start-up comporte une équipe diversifiée de 32 ingénieurs en chimie, en matériaux et en aérospatiale, dont Gil Eilam, ancien ingénieur en chef du système de défense antimissile Fronde de David et Ran Livne, ancien PDG de la Ramon Foundation et responsable de la deuxième mission spatiale israélienne. Alon Ushpiz, un ancien directeur du ministère des Affaires étrangères, a également rejoint l’équipe, qui travaille principalement depuis Césarée, où son premier accélérateur est actuellement en cours de construction.
« Nous exploitons le savoir-faire unique de l’industrie israélienne de la défense, qui a fait ses preuves dans le développement de systèmes extrêmement complexes comme le Dôme de fer ou l’Arrow en très peu de temps, avec des coûts de développement moins élevés », a ajouté Haddad Chmelnik.
La société, qui devra à terme construire un accélérateur plus grand en dehors d’Israël, espère atteindre l’espace dans les cinq ans à venir, a-t-elle poursuivi.
Le système de lancement de l’accélérateur de la start-up consistera en un long tube rond, semblable au canon d’un fusil, équipé d’un rail sur toute sa longueur. Une capsule renforcée, contenant la charge utile, sera propulsée le long du rail par une série de bobines générant une onde électromagnétique, jusqu’à ce qu’elle atteigne l’extrémité, d’où elle sera lancée dans l’espace à une vitesse pouvant atteindre huit kilomètres par seconde, a indiqué la start-up.
« Plutôt que d’utiliser des propulseurs de fusée brûlant des quantités considérables de carburant, l’énergie provient de l’électricité, et elle accélère en traversant les bobines », a déclaré Haddad Chmelnik. « Un condensateur capte l’énergie, puis la libère vers les bobines, et la capsule traverse ce tube et s’envole dans le ciel. »
Une fusée conventionnelle lancée dans l’espace peut transporter au maximum 4 % de son poids en charge utile. Un lancement cinétique permet d’augmenter la capacité de charge utile à environ 45 %, en supprimant le besoin de lourds réservoirs de carburant, a expliqué Haddad Chmelnik.
Le système réduira donc les coûts liés à l’approvisionnement en équipements, carburants et matières premières des stations spatiales et des satellites à un dixième de celui des lancements de fusées traditionnels, a affirmé la société.
Selon Haddad Chmelnik, le système de lancement permettra un ravitaillement fréquent, rapide et peu coûteux des stations spatiales, des satellites et des futures infrastructures spatiales. Il ne conviendra toutefois pas aux astronautes ou aux humains en général, en raison de la force élevée créée par l’accélération.
Le système de lancement spatial de Moonshot sera conçu pour acheminer des charges utiles de petite à moyenne dimension, notamment des ressources et des équipements. Il viendra en complément de fusées lourdes telles que les systèmes Falcon 9 ou Starship de SpaceX.
La levée de fonds de la start-up, d’un montant de 12 millions de dollars, est menée par la société de capital-risque londonienne Angular Ventures. Elle inclut une subvention d’un million de dollars de l’Autorité israélienne pour l’innovation. Moonshot a indiqué avoir signé des accords préliminaires avec des prestataires de services de logistique et de transport spatiaux, parmi lesquels l’italien D Orbit et l’américain Orbit Fab.
Pour nous la première étape consiste à construire un accélérateur électromagnétique capable de propulser une masse de quelques kilos à une vitesse hypersonique. Celui-ci sera développé en Israël. Ensuite, nous devrons fabriquer un accélérateur plus grand, ce qui nécessitera des installations en dehors d’Israël. Mais la R&D restera ici », a déclaré Haddad Chmelnik. « Nous pensons pouvoir atteindre l’espace dans environ cinq ans. Cela dépendra toutefois des financements supplémentaires. »
Si elle a reconnu que des équipes de recherche, aux États-Unis et en Chine, travaillaient également au développement de systèmes de lancement cinétiques et avaient réalisé des tests avec des accélérateurs électromagnétiques, elle a toutefois insisté sur le fait que Moonshot bénéficiait d’un avantage.
« En Israël, nous profitons du talent et du savoir-faire issus de l’industrie de la défense, qui nous permettent d’arriver à nos fins rapidement et à moindre coût », a-t-elle fait remarquer.
Besoin de rapidité
Parallèlement à son projet spatial, Moonshot construit un accélérateur à échelle réduite qui permettra aux entreprises du secteur de la défense d’effectuer des essais hypersoniques, avec pour conséquence le raccourcissement des délais de développement des armes hypersoniques, dans le cadre d’une course mondiale à la fabrication de missiles et autres armes toujours plus rapides.
Les armes hypersoniques, qui volent à des vitesses supérieures à Mach 5 – soit cinq fois la vitesse du son -, posent de véritables défis aux systèmes de défense antimissile en raison de leur vitesse et de leur maniabilité.
« Aujourd’hui, les États-Unis investissent massivement dans leur programme Golden Dome. Israël continue pour sa part de perfectionner des systèmes comme l’Arrow 3 et la Fronde de David », a fait savoir Haddad Chmelnik. « Mais les essais restent un obstacle : les développeurs s’appuient sur des simulations partielles, des souffleries ou des lancements de missiles extrêmement coûteux. »
L’accélérateur d’essais hypersoniques Mach-6 de Moonshot sera, quant à lui, conçu pour permettre de passer d’un essai par semaine à plusieurs essais par jour, avec « des coûts réduits de plusieurs ordres de grandeur », a affirmé la start-up.
Times of Israel
