L’économie d’Israël redémarre, mais gare au trompe-l’œil.

La relance de l’économie israélienne a bien eu lieu au premier trimestre 2025 avec une croissance du PIB qui s’est établie à 3,4% ; la poursuite de la guerre continuera de fragiliser la reprise en raison de son coût élevé.

Le redémarrage de l’économie israélienne a été amorcé au premier trimestre 2025 : le produit intérieur brut (PIB) a rebondi au rythme annuel de 3,4%, soit une croissance par habitant de 2,2%.

Selon les données que vient de publier le Bureau central de la Statistique à Jérusalem, le rebond de l’activité en ce début 2025 est d’autant plus encourageant qu’il fait suite à la stagnation de l’activité en 2024 : le PIB avait alors connu une petite croissance de 1% et une croissance par habitant négative (-0,3%).

Reprise fragile

La croissance du PIB 2025 est tirée d’abord par les investissements qui font un bond de 8,7% au premier trimestre de cette année. S’ils récupèrent ainsi une bonne partie de leur recul enregistré en 2024 (-6,4%), il faut se méfier des tendances pour l’avenir : la hausse de 2025 reflète surtout la reprise des investissements dans le secteur de la construction (+45%) alors que les investissements dans les hautes technologies de l’information et communication (ICT) ont chuté de 75%.

La croissance 2025 reste aussi entretenue par la dépense publique : si celle-ci n’a pas augmenté au premier trimestre (-0,2%), elle reste à son niveau élevé de 2024. La dépense publique ne garantit pas une croissance durable, elle se traduit surtout par l’élévation de la dette extérieure du pays.

Par ailleurs, le secteur privé (BTP et secteur public exclus) a retrouvé un rythme positif d’activité : la croissance du PIB privé est montée à 4,4% au premier trimestre 2025, hausse qui fait suite à la baisse de 0,7% en 2024.

Moteurs à l’arrêt

En revanche, de nombreux moteurs de croissance tournent toujours au ralenti, alors attention au trompe-l’œil ; la poursuite de la guerre pèsera lourd sur les comptes publics et sur le revenu disponible des ménages.

Il en va ainsi de la consommation des ménages qui marque le pas : elle a reculé de 5% au premier trimestre 2025, une forte baisse qui fait suite à la hausse de 4,1% enregistrée au trimestre précédent. L’anticipation fin 2024 des achats de biens durables, liée à la hausse de certaines taxes début 2025, explique ce zig-zag de la consommation privée.

Le commerce extérieur aussi n’a pas contribué à la croissance. Les exportations de biens et services ont baissé de 1,8% au premier trimestre 2025. Ce taux négatif reflète la hausse des exportations de diamants, mais la baisse des exportations de hautes technologies. Sur toute l’année 2024, les exportations israéliennes avaient connu une chute de 5%.

Si les importations ont redémarré en ce début 2025 (+5%), elles sont composées principalement de matériel militaire. Les importations civiles, elles, ont baissé de 18% au premier trimestre 2025.

Globalement, ces données de la comptabilité nationale montrent qu’en ce début 2025, l’économie israélienne est sortie de la récession de 2024. Si ces résultats sont satisfaisants, il n’empêche que le redémarrage de 2025 reste aléatoire – car entretenu par le haut niveau de la dépense publique – alors que la consommation privée marque le pas.

Sans compter la flambée de l’inflation (3,6% sur les douze derniers mois) qui va maintenir des taux d’intérêt élevés, amputer le pouvoir d’achat des ménages et freiner d’autant leurs dépenses. La poursuite de la croissance sur toute l’année 2025 reste donc aléatoire, du moins tant que l’état de guerre se poursuivra.

à propos de l’auteur
Jacques Bendelac est économiste et chercheur en sciences sociales à Jérusalem où il est installé depuis 1983. Il possède un doctorat en sciences économiques de l’Université de Paris. Il a enseigné l’économie à l’Institut supérieur de Technologie de Jérusalem de 1994 à 1998, à l’Université Hébraïque de Jérusalem de 2002 à 2005 et au Collège universitaire de Netanya de 2012 à 2020. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et articles consacrés à Israël et aux relations israélo-palestiniennes. Il est notamment l’auteur de « Les Arabes d’Israël » (Autrement, 2008), « Israël-Palestine : demain, deux Etats partenaires ? » (Armand Colin, 2012), « Les Israéliens, hypercréatifs ! » (avec Mati Ben-Avraham, Ateliers Henry Dougier, 2015) et « Israël, mode d’emploi » (Editions Plein Jour, 2018). Dernier ouvrage paru : « Les Années Netanyahou, le grand virage d’Israël » (L’Harmattan, 2022). Régulièrement, il commente l’actualité économique au Proche-Orient dans les médias français et israéliens.
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