Le mensonge dérange autant qu’il fascine. À des degrés divers, tout le monde le pratique, peu osent l’admettre, et encore moins nombreux sont ceux qui en mesurent toutes leurs conséquences. Mais en fonction des normes culturelles, sociales et religieuses, le mensonge n’a pas toujours la même valeur morale, ni les mêmes implications relationnelles.

Dans la plupart des sociétés occidentales, le mensonge est perçu comme une faute, un manque d’intégrité, sauf quand il se veut diplomatique et préserve des intérêts vitaux ou la paix sociale. Quoiqu’il en soit, lorsqu’il est intentionnel et efficace, il incite à la récidive. Après tout, si ça marche, pourquoi s’arrêter là ? Difficile de résister à l’envie de maximiser ses chances, surtout si on se découvre un vrai talent de faussaire.

Dans les organisations, l’élévation dans la hiérarchie des responsabilités s’accompagne généralement d’une sensibilité accrue au mensonge. Pour un dirigeant, il est crucial de distinguer ceux qui rapportent fidèlement les faits de ceux qui les déforment, voire les inventent, pour se valoriser, attirer des faveurs ou dissimuler leurs propres erreurs.

Plus l’effectif et la complexité d’une organisation augmentent, plus le mensonge devient un enjeu prégnant. Pour les dirigeants de grandes entreprises, il est impossible d’être constamment en prise directe avec le terrain. Leur évaluation des acteurs et des enjeux repose principalement sur des informations intermédiées, c’est-à-dire filtrées, interprétées et adaptées par diverses catégories de personnes.

Ce sont d’abord les membres de leur cercle rapproché, qui peuvent eux-mêmes être relativement éloignés de l’opérationnel, des clients et des fournisseurs. La présence de consultants externes, censés apporter un regard neutre et distancié, augmente encore le degré d’intermédiation autour du dirigeant.

Dans ce jeu de miroirs, discerner le vrai du faux apparaît comme une compétence indispensable. C’est d’ailleurs ce que confesse un ancien dirigeant d’une entreprise du CAC 40 : « Identifier ceux qui disent la vérité et ceux qui la manipulent à leur profit a toujours été un des défis majeurs pour un leader ».

Mais comment déceler le mensonge ? Plusieurs pistes sont à considérer, à commencer par la mémoire. Se souvenir de ce qui a été dit pour repérer les contradictions constitue une arme redoutable. Pour un menteur, le déficit de mémoire est souvent fatal. Le recoupement avec d’autres sources représente également un moyen chronophage mais efficace de repérer les contre-vérités.

L’expression verbale du menteur offre aussi de précieux indices. Une surabondance d’arguments, un excès de justifications et l’usage récurrent de précautions oratoires telles que « il paraît que » ou « on m’a dit que » sont autant de signaux à considérer. Par ailleurs, le langage non verbal n’est pas en reste : un calme surjoué, un regard fuyant ou, au contraire, anormalement insistant peuvent trahir une volonté de travestir le réel.

Dans tous les cas, l’expérience de la nature humaine et une capacité de jugement aiguisée sont des atouts précieux. Pour un dirigeant, s’entourer de personnes loyales exige cette faculté de déceler le mensonge sans tomber dans la paranoïa, un véritable talent permettant de démasquer les artistes du vraisemblable, d’écarter les faussaires de la sincérité et d’éloigner à jamais les fossoyeurs de la vérité.

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