Avec la fin d’année, il est temps de faire le point sur 2024. Plutôt que de retracer en détail un exercice économique tumultueux, voici sept faits marquants à retenir. Il y a d’abord la bonne nouvelle venue des finances publiques. Non pas que le creusement du déficit à plus de 6% du PIB en soit une. Pas plus que l’endettement à près de 115%, bien au contraire, mais 2024 marque la fin d’un déni français. Hausses d’impôts et/ou réduction des dépenses publiques sont désormais au cœur des discussions. Le déficit et la dette publique, souvent écartés des discours politiques, sont devenus une priorité nationale.
Inflation maîtrisée mais conséquences lourdes.
Deuxième, et dernier point positif de l’année, l’inflation a été domptée. La hausse des prix à la consommation est retombée plus rapidement que prévue, passant de plus de 3% en janvier à moins de 1,5% en fin d’année, très loin des pics atteints fin 2022-début 2023. Une baisse de régime favorisée par le reflux des prix de l’énergie et la pression mise par les produits importés, de Chine principalement, sur les prix des produits manufacturés. Seule poche de résistance, les prix des services alimentés par les hausses de salaires passées. La désinflation a donné un coup de pouce au pouvoir d’achat ; partagée par les autres pays européens, elle a permis à la BCE d’entrer dans un nouveau cycle de détente monétaire. Cependant, la brutalité du retournement a compliqué l’équation budgétaire en freinant les rentrées fiscales, tandis que certaines dépenses indexées sur l’inflation augmentaient encore rapidement. À cela s’ajoutent les revendications salariales des agents publics, adossées à la hausse des prix passés. Les salariés du privé ont les mêmes doléances, au moment où la pression est mise sur les marges.
Fragilité du tissu productif
Le risque est de fragiliser le tissu productif déjà marqué par une déferlante de défaillances, c’est le troisième point marquant de 2024. La sinistralité a explosé. Tous les secteurs sont concernés, toutes les entreprises quelle que soit leur taille, même si ce sont les PME qui paient actuellement le plus lourd tribut. En hausse aussi, le coût économique de ces défaillances a dépassé son ancien record atteint lors de la grande récession de 2008-2009. Cette vague montante n’est plus un effet de rattrapage post-Covid ou l’héritage de l’explosion des créations d’entreprises ces dernières années, mais bien le symptôme de la montée des difficultés économiques et financières. Le signal envoyé n’est pas bon, notamment en direction du marché du travail.
C’est certainement la rupture de l’année : le retour de flamme du chômage. Depuis deux trimestres, le secteur privé détruit des emplois et le nombre de chômeurs s’inscrit à nouveau sur une tendance haussière. Le taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans notamment frôle à nouveau la barre des 20%, au plus haut depuis près de 5 ans, une augmentation alarmante pour la prochaine génération de diplômés qui s’apprête à affronter un marché du travail dégradé. Comme les embauches, l’investissement a été coupé, symptôme de chefs d’entreprise en plein doute car plongés dans un brouillard épais. Excepté en 2020, exercice marqué par les différents confinements, il s’agit du premier recul depuis 12 ans. L’effort d’investissement des entreprises, principal soutien de la demande intérieure depuis la fin de la crise de la Covid, s’est fortement relâché en 2024.
Des secteurs sinistrés
L’inquiétude des dirigeants d’entreprise est partagée par les ménages, dont le taux d’épargne atteint des niveaux supersoniques. Il faut prendre la pleine mesure d’une année 2024 hors norme en la matière. À près de 9%, le taux d’épargne financière se situe, hors la parenthèse exceptionnelle de la crise sanitaire, à son plus haut niveau depuis 1949. L’encours des placements financiers des Français est désormais supérieur à 6 000 milliards d’euros, soit près de deux fois l’endettement public.
Enfin, 2024 restera une année noire pour deux grandes branches d’activité. L’agriculture : maladie de la langue bleue, pluviosité record au printemps, maigres récoltes et pour terminer, signature par Ursula von Der Leyen de l’accord avec le Mercosur. Pour la filière immobilier-construction, c’est la descente aux enfers. Les ventes dans l’ancien s’éloignent de la barre du million, et les mises en chantier dans le neuf touchent le fond. À peine plus de 250 000, au plus bas depuis plus de 50 ans.
2024, une « annus horribilis » pour l’économie française, à vite oublier et qui ne laissera pas de regrets.
ALEXANDRE MIRLICOURTOIS.
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