LE PLUS. Les temps sont durs pour le textile made in France. Guillaume Gibault, président fondateur du Slip Français, nous explique la démarche de son entreprise pour se relancer dans ce contexte de crise.
Les marques du made in France textile rencontrent des difficultés et certaines d’entre elles sont contraintes de préparer des plans de transformation massifs. Le Slip Français, l’un des principaux acteurs du secteur, n’y échappe pas et est obligé de diviser ses prix presque par deux pour se relancer. Guillaume Gibault, président fondateur du Slip Français, nous explique la démarche de son entreprise dans ce contexte de crise.
Techniques de l’ingénieur : Il y a tout juste un an, Le Slip Français se lançait un défi : vendre 50 000 slips et boxers en 20 jours pour diviser son prix par deux. Qu’est-ce que cette expérience vous a appris ?
Guillaume Gibault : Que les Français nous suivent ! Le made in France est important à leurs yeux et en proposant un produit de qualité au bon prix, ils nous suivent sans hésiter. L’enjeu est d’être capable de proposer un prix compétitif dans l’équation économique complexe du made in France.
Vous avez lancé (r)EVOLUTION, une nouvelle gamme de boxers et slips en coton à 25 €, contre un tarif habituellement autour de 40 €. Pouvez-vous nous expliquer votre démarche ?
On poursuit le test de l’été 2023. La seule solution pour proposer un produit à un prix compétitif est le volume. C’est la solution de l’industrialisation, de la compétitivité et en massifiant, nous pouvons réduire nos coûts et donc nos prix de vente. Nous commençons par nos sous-vêtements, notre cœur de gamme, mais réfléchissons à la suite pour étendre la démarche sur d’autres gammes.
Nous essayons de construire nos achats au plus juste. Massifier oui mais vendre vite et au plus court des productions. C’est l’avantage du made in France et du circuit court. On ajuste nos productions toutes les semaines pour suivre la demande au plus proche. C’est l’une des conditions indispensables à la rentabilité économique du projet.
Le textile made in France affronte une nouvelle crise profonde. Quelle est aujourd’hui la situation du Slip Français ?
Dans l’industrie il n’y a malheureusement plus d’acteur majeur depuis un moment, les ateliers déjà fragiles sont aujourd’hui encore plus vulnérables. Le Slip Français est dans un moment charnière de profonde transformation de l’entreprise et de son modèle économique.
Les premiers résultats de (r)ÉVOLUTION sont très satisfaisants avec 210 000 ventes en quatre mois mais ce n’est qu’un début et nous restons très vigilants quant à la pérennité de l’entreprise qui n’est pas encore garantie ! Nous avons besoin du soutien des Français.
Prix de l’énergie, inflation, boom de la seconde main et de la fast-fashion… Quelles sont les principales causes identifiées pour expliquer la situation actuelle ? Est-ce une crise momentanée ou plus profonde ?
C’est le résultat d’un mouvement de fond depuis 30 ans. Désindustrialisation, désintérêt pour la filière, manque d’innovation, d’investissement… auxquels se rajoutent des éléments plus conjoncturels : désillusion du post-covid, inflation, flambée de l’énergie, concurrence féroce, seconde main… Le contexte économique est extrêmement défavorable et oblige à être d’autant plus performant.
La loi anti fast-fashion et la taxe « Shein » n’ont-elles pas amélioré la situation ? Quelles demandes portez-vous auprès des pouvoirs publics ?
Le temps législatif est le temps long. Nos trésoreries se pilotent en mois, si ce n’est en semaines ou en jours… La solution n’est pas selon moi dans la bataille contre les autres mais la bataille contre nous-mêmes : donner un cadre plus favorable aux entreprises du made in France en leur déployant la puissance de la grande distribution et en ouvrant les accès aux marchés publics.