Le Maître luthier israélien Amnon Weinstein est mort cette semaine.

Le luthier israélien Amnon Weinstein a été formé par son propre père, ensuite par les meilleurs spécialistes dans les mythiques ateliers de lutherie de Crémone. La ville de Crémone est, à juste titre, considérée comme la capitale mondiale de la lutherie. Elle est même probablement le berceau des instruments à cordes frottées tels que nous les connaissons depuis le 16e siècle et les géniaux précurseurs qu’ont été Amati, Guarneri et Stradivari. Crémone est, au titre du savoir-faire de ses 160 ateliers de lutherie, classée au Patrimoine culturel immatériel de l’Unesco

Né en juillet 1939 à Tel Aviv dans la Palestine sous mandat britannique où ses parents Moshe et Golda – des Juifs lituaniens – avaient immigré l’année précédente, Amnon Weinstein n’a pas eu lui-même à souffrir de la Shoah. Mais il a vécu l’immense douleur de ses parents, confrontés à la disparition de la quasi-totalité des membres de leur famille, déportés et exterminés par dizaines dans les camps nazis.

Entre un père devenu mutique sur la « Solution finale » et une mère dévastée qui désignait comme sa « famille » les cadavres des camps lorsqu’une image surgissait, Amnon s’est peu à peu investi d’une responsabilité en termes de « mémoire ». Grâce à lui et et au collectif « Les Violons de l’Espoir », plusieurs violons qui appartenaient à des déportés juifs avaient résonné à Paris.

NOS ARCHIVES : « C’est l’Orchestre Le Palais Royal dirigé par Jean-Philippe Sarcos qui aura l’honneur d’offrir ce moment musical riche d’émotions. En effet, ces instruments appartenaient à des déportés juifs victimes de la Shoah. Mais ces violons rescapés de l’Holocauste sont réparés depuis plus de 30 ans par le luthier Amnon Weinstein.

Aujourd’hui, ce sont désormais 110 violons qui ont pu être retrouvés. Cette collection fait partie d’un projet intitulé « Les Violons de l’Espoir », qui organise des concerts avec ces violons depuis plusieurs décennies, principalement aux Etats-Unis. Mais pour Maxime Perez, fondateur de l’association Speranza, il était primordial que ces instruments viennent en France.

Amnon Weinstein a ainsi été invité à présenter ces précieux objets. « Lui et sa famille ont quitté La Pologne à la fin des années 30 pour rejoindre le futur Etat d’Israël. Luthier, comme son père, Amnon Wenstein a récupéré les instruments des rescapés des camps de la mort lorsqu’ils sont venus se réfugier à la fin de la guerre. Ils avaient besoin de s’en débarrasser car la figure du violon dans la culture juive d’Europe de l’Est est tellement forte qu’elle a marqué leur martyr. De plus, les nazis s’en servaient pour les humiliés encore davantage » nous raconte Maxime Perez.

Les violons se sont donc entassés dans l’atelier d’Amnon Wenstein jusqu’à ce qu’il retrouve le violon de son propre grand-père, victime de la guerre. « C’est à ce moment qu’il a eu un déclic : il fallait qu’il se lance dans cette aventure » affirme l’organisateur de concerts.

« Ce sont des violons qui sont revenus de l’enfer ».

Le maître luthier s’est penché sur ces instruments en leur offrant une seconde vie. Ce projet des « Violons de l’Espoir » a alors pris une ampleur considérable. De nombreux concerts ont ainsi vu le jour dans le monde entier permettant de faire entendre au plus grand nombre ces violons et leurs histoires. « Encore cette semaine, un nouveau violon vient de rejoindre la collection, nous raconte Maxime Perez. J’ai reçu un appel très émouvant il y a quelques jours d’un versaillais de 75 ans qui m’a raconté son histoire… Il avait 8 mois en 1944 quand son père s’est fait arrêter à Nice par la Gestapo. Sa mère a juste eu le temps d’emporter une valise contenant deux violons. Ces instruments sont la seule chose qu’il lui reste de son père et il a décidé de nous les transmettre afin que l’histoire et la voix de son père résonnent à travers ces violons ». Ils seront donc restaurés pour ensuite être joués lors d’un prochain concert pour la première fois depuis la guerre… »

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