Le mois dernier, la BBC Arabic a réuni un panel composé de l’ex-ambassadeur égyptien à l’ONU, Moataz Khalil, du chef du bureau des médias du Fatah, Munir al-Jaghoub, du journaliste qatari Abdullah Al-Khater et d’Idit Bar, la seule femme israélienne régulièrement invitée sur les chaînes d’information arabes pour plaider la cause de l’État juif.
Cette nuit-là, Bar avait dû répondre à des accusations concernant la politique d’Israël dans les Territoires palestiniens, commenter la stratégie de guerre du gouvernement à Gaza et expliquer les divisions au sein de la société israélienne – sujet de discussion favori d’un monde arabe, d’où le débat démocratique est le plus souvent absent, explique-t-elle.
« À chaque fois, avant de passer à l’antenne, je me demande si cela en vaut la peine – de me soumettre à pareille humiliation », admet-elle lors d’une interview accordée au Times of Israël. « On me prend pour un punching-ball, on me crie dessus. Je dois rester calme et écouter des questions longues de cinq minutes, très alambiquées, comportant des accusations très dures contre nous. Et puis je dois répondre à toutes ces calomnies dans une langue qui n’est pas ma langue maternelle. »
Depuis les atrocités commises par le Hamas le 7 octobre dernier en Israël et la guerre qui s’en est suivie contre le Hamas, les médias arabophones s’en sont presque tous rendus au récit palestinien, qui présente le conflit actuel comme une agression israélienne injustifiée contre Gaza. Ils passent totalement sous silence les crimes commis par les terroristes le 7 octobre et leur brutalité systématique envers des civils israéliens.
Ce récit négationniste a été adopté non seulement par des médias historiquement hostiles à Israël, tels qu’Al Jazeera, mais aussi par la BBC, supposée plus juste sur sa chaîne en langue arabe, où Bar est régulièrement invitée.
La chaîne arabe de la BBC a été critiquée à la mi-octobre, lorsqu’il est apparu que certains de ses journalistes approuvaient et publiaient sur les réseaux sociaux des messages justifiant le meurtre de civils israéliens le 7 octobre, en laissant entendre que tous les jeunes Israéliens étaient des combattants et donc des cibles légitimes, et ce, en dépit des preuves accablantes que la plupart des victimes du Hamas n’étaient pas des soldats, mais trop souvent des enfants et des personnes âgées.
« Ils m’ont mise dans la lumière », confie-t-elle. « Je me suis demandée pourquoi ils me rappelaient, jusqu’à ce que je réalise que je contribuais sans doute à faire augmenter leur taux d’écoute », explique-t-elle, ajoutant en plaisantant : « Je devrais recevoir une part des gains. »
Bar, qui est titulaire d’une maîtrise de l’Université hébraïque de Jérusalem en études arabes et du Moyen-Orient, a des années d’expérience dans l’enseignement de l’arabe dans des établissements liés à la défense et à l’Université ouverte d’Israël. Elle donne des conférences sur la société et la culture arabes, et dirige un podcast en hébreu sur le statut des femmes dans les sociétés islamiques. C’est une collectionneuse passionnée de caricatures politiques arabes, qu’elle analyse et publie sur son compte X.
Elle explique ce qui la pousse à poursuivre cette diplomatie publique et à débattre avec des commentateurs et des présentateurs hostiles pour contrer leur représentation « satanique » de l’État juif, comme elle l’a décrit.
« Quand je passe à l’antenne, je me dis que l’État d’Israël repose sur mes épaules. Je ne suis pas là pour représenter le gouvernement ou l’armée. Je suis là pour représenter mon amour pour Israël. Si je ne participe pas à ces panels, qui le fera ? », confie-t-elle.
« Même si je ne parle que cinq minutes avant d’être interrompue et de ne pas être autorisée à plaider davantage la cause d’Israël », poursuit-elle, « dans ce court laps de temps, je peux dire quelque chose qui s’écarte du discours univoque de la chaîne. Un spectateur arabe en Irak, en Syrie ou au Liban dressera peut-être l’oreille et se dira : ‘Hé, peut-être qu’elle a raison.’ »