SPECIAL RUSSIE. Malgré l’invasion de l’Ukraine, Israël n’a pas sanctionné la Russie. Les firmes de l’Etat Hébreu restent prudentes  vis à vis de la Russie et n’ont pas hésité un instant à continuer à commercer avec la Russie.

Fait assez rare compte tenu de l’anarchie verbale et constante  des politiciens israéliens : ils font preuve d’une rare prudence face à la complexité diplomatique de leurs relations avec la Russie.

La même vigilance semble être nécessaire pour les entreprises et les organisations israéliennes qui risquent de s’égarer dans le labyrinthe des sanctions internationales qui limitent de manière stricte leurs activités en Russie et avec des entités russes.

Dans la réalité, et les chiffres le prouvent, les israéliens poursuivent sans entraves leurs opérations en Russie.

Quelques firmes technologiques israéliennes (peu nombreuses) ont renoncé à leurs opérations commerciales en Russie en raison de la guerre en cours avec l’Ukraine. C’est le cas de Fiverr, une compagnie qui met en relation entreprises et travailleurs indépendants offrant des services numériques ; du créateur web Wix ; de la compagnie de paiement Payoneer et du géant du jeu Playtika.

Les industriels et exportateurs israéliens sont au courant d’un fait indéniable : la Russie poursuit son développement, malgré les sanctions internationales. L’étude ci-dessous est tout a fait intéressante.

ETUDE XERFI.  « L’économie russe tient bon. Des deux côtés de l’Atlantique, l’ambition était pourtant claire, qu’elle soit exprimée à travers la voix de Bruno Le Maire : « nous allons provoquer l’effondrement de l’économie russe » ou par celle de sa collègue américaine, Janet Yellen : « l’économie russe sera dévastée ».


Le rouble à la peine


Outre le tarissement des entrées de devises via l’embargo sur les hydrocarbures, l’arme de destruction massive jouée par les Occidentaux était celle d’une déstabilisation économique par la guerre des changes. L’effondrement de la monnaie devant déclencher une réaction en chaîne : renchérissement des produits importés, rationnement des importations donc de l’offre pour exacerber les pénuries liées aux restrictions à l’export imposées par l’UE et les États-Unis. Ce cocktail devait conduire à l’effondrement de la croissance et à une flambée inflationniste, voire à l’hyperinflation.

C’est indéniable, le rouble est à la peine. Face au dollar, il s’est déprécié de 16% par rapport à ses niveaux de début 2022. Mais cela reste sans commune mesure avec le dévissage de 50% qui avait suivi le début des hostilités et la monnaie russe semble s’être stabilisée depuis peu. C’est toutefois un résultat obtenu aux forceps, c’est-à-dire au prix d’une remontée énergique du taux directeur qui a doublé en l’espace de 4 mois pour s’élever à 15%. Un resserrement rendu également nécessaire pour contenir l’inflation qui frôle de nouveau 7% et se situe à un pic depuis février 2023.


Consommation et investissement résistent


Le contexte n’est donc vraiment pas favorable à la demande domestique. Pourtant, côté consommateur, si les ventes en volume du commerce de détail coincent, elles ne décrochent pas et les immatriculations de véhicules particuliers remontent progressivement la pente. Idem, pour l’investissement des entreprises. Il se renforce et la production manufacturière plafonne à haut niveau. Le renchérissement du coût du crédit, la hausse des prix sont certainement trop récents pour significativement impacter l’activité, mais la résilience de l’économie russe c’est aussi la conséquence d’une combinaison mêlant préservation des recettes issues des hydrocarbures, réorientation géographique du commerce extérieur, substitution des imports par une production plus locale et économie de guerre.


La rente pétrolière persiste


Hautement sensibles, les statistiques sur les hydrocarbures sont une arme de propagande. Ce qui émerge cependant avec une quasi-certitude : 1- si les productions de pétrole et de gaz sont en baisse elles ne sont pas effondrées. 2- l’Inde, la Chine, la Turquie se sont substituées à la clientèle européenne. 3- L’imposition par les pays occidentaux d’un prix plafond à 60 dollars le baril est un échec. Ils ont certes interdit de fournir une assurance aux tankers transportant du pétrole russe vendu au-delà du seuil autorisé, mais Moscou s’est constitué une flotte d’une centaine de pétroliers d’occasion pour contourner cette interdiction et les échanges se situent plutôt autour de 80 dollars le baril. Résultat, la rente pétrolière persiste : encore 18,8 milliards de dollars engrangés en septembre dernier, au plus haut depuis juillet 2022 selon l’Agence Internationale de l’Énergie. Cette manne permet à la fois de financer l’effort de guerre (qui sollicite énormément l’appareil productif), de distribuer des prestations sociales en soutien au pouvoir d’achat et des subventions aux entreprises.


Coupée des pays occidentaux, la Russie est également parvenue à trouver auprès des BRIC un ensemble commercial, politique, financier et monétaire qui lui offre une alternative, notamment en matière d’approvisionnements. La rapidité du redéploiement géographique des échanges en 2022 a été stupéfiante et explique pourquoi, l’économie russe n’a pas été en manque de fournitures, de composants ou autres très longtemps pour continuer à tourner.


De même que les sanctions prises contre la Russie après l’annexion de la Crimée avaient conduit le pays à substituer ses importations agricoles européennes et américaines par une production domestique pour finalement devenir une puissance exportatrice, une nouvelle offre industrielle russe émerge, notamment dans l’industrie des semi-conducteurs. En étant largement ignorées par une grande partie du monde, les sanctions occidentales n’ont pas atteint leurs objectifs. L’économie russe ne s’est ni effondrée ni été dévastée, mais se diversifie et consolide sa croissance potentielle ».
ALEXANDRE MILICOURTOIS.

XERFI. COPYRIGHTS.

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