La sortie récente du film Napoléon de Ridley Scott constitue une bonne occasion de revenir sur les actions que Napoléon Bonaparte a exercées vis-à-vis des Juifs qui ont souffert du temps de l’Ancien Régime.
Globalement, leur situation s’améliora grâce à lui, non par tolérance religieuse, car on a retrouvé plusieurs textes où il exprime son opinion négative sur les Juifs, mais par pragmatisme. L’empereur a agi en homme d’État, dans le moment historique où il vivait. Sa méfiance à l’égard des juifs n’avait aucun fondement religieux : c’est l’ordre public qui l’intéressait.

Mais plus que des mesures de police, il voulait fonder une solution durable.

En comparaison de la situation antérieure, ses choix constituèrent une étape d’un chemin qui allait s’avérer long et difficile, dans une France toujours tentée par « l’antisémitisme ».

En 1808 et après 1810, époque de l’assouplissement du décret « infâme » (Cf ci-dessous), les juifs de l’Empire français étaient les seuls en Europe à bénéficier de la liberté de culte, d’un statut, de rabbins reconnus par l’État. Ils étaient « émancipés » avant d’être intégrés, expérience elle aussi unique en Europe, les intentions libérales de Frédéric-Guillaume III de Prusse et d’Alexandre Ier de Russie n’ayant guère été suivies d’effets concrets et généraux et lLa hiérarchie israélite en parut satisfaite à l’époque.

Elle le montra tout au long du règne en encourageant ses coreligionnaires à soutenir l’Empire : « Par l’entremise de la Révolution française, écrit Pierre Birnbaum dans l’étude qu’il a consacrée aux prières prononcées dans les synagogues, les Juifs sont devenus des citoyens de la patrie ; en revenant à l’alliance verticale monarchique, ils préservent leur insertion dans la patrie […].

De la monarchie des Bourbons à l’Empire napoléonien, les Juifs s’affichent comme les plus fidèles des sujets : nulle duperie dans cette allégeance puisque à leurs yeux –et [leurs] textes le démontrent amplement-, le monarque comme l’Empereur ont été choisis par l’Éternel pour accomplir Sa volonté ». Napoléon n’en demandait pas plus.
Les contreparties demandées ou imposées s’inscrivaient dans la ligne de la politique impériale d’organiser les cultes afin de les contrôler et de protéger l’ordre public en les soumettant à l’État. « En dépit de l’hostilité de Napoléon pour les juifs en général et son décret infâme en particulier, on ne peut lui dénier que son organisation de la vie juive, qui impliquait de placer le judaïsme sur le même pied que le catholicisme, représenta une remarquable tentative de résoudre les problèmes des juifs dans le monde moderne », estime l’américain Simon Schwarzfuchs, ce que Jacques Godechot a résumé par : « Dans l’ensemble, Napoléon a contribué, plus qu’en aucun autre pays, à l’assimilation des juifs de France », même si ce fut au prix d’un abandon partiel et temporaire des principes d’égalité, de liberté des cultes et du commerce pour une partie de la population.

Source : Napoléon.org et Thierry Lentz

NB : Le décret du 17 mars 1808 prônait, pour une période de dix ans, « la réforme sociale des juifs » en réduisant voire en annulant les dettes à leur égard, en créant une patente spéciale  pour ceux qui voudraient pratiquer le commerce, en réglementant les hypothèques qu’on pouvait leur accorder.

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