LES ECHOS. EXTRAITS UNIQUEMENT. « La priorité pour la cinquantaine d’entreprises françaises installées en Israël est de garantir la sécurité de leurs salariés.Au nouveau confinement qui s’installe s’ajoute le défi du départ des réservistes mobilisés par Tsahal et celui de la menace d’une extension régionale du conflit. |
Une chappe de plomb s’est abattue sur Israël. « L’attaque du Hamas est intervenue pendant les vacances scolaires et a pris le pays par surprise. Il a fallu réagir dans l’urgence. La priorité pour les entreprises est d’assurer la sécurité de leurs salariés. Beaucoup ont repris le télétravail », raconte Anne Baer, présidente des conseillers du commerce extérieur de la France en Israël et fondatrice d’iKare Innovation. Decathlon, Thales ou encore Altice… Selon elle, et sans compter les entreprises locales dirigées par des Français, une cinquantaine de filiales de sociétés hexagonales sont installées sur place, le plus souvent dans la région de Tel-Aviv. Cette frange centrale du pays est plus à l’écart de la zone de conflit au sud, sans pour autant être épargnée par les tirs de missiles qui obligent quotidiennement les habitants à rejoindre un abri. En termes d’échanges commerciaux, Israël n’est que le quarantième client de l’Hexagone et son cinquantième fournisseur, précise le service économique de l’ambassade de France en Israël, mais cette diaspora irrigue l’économie locale et vit à son rythme. Pour le moment, quelques jours après l’attaque du Hamas, l’heure n’est pas à l’exode chez les salariés français. Seules 4.000 demandes de rapatriements auraient été effectuées auprès de l’ambassade de France en Israël. Drahi sur le terrain « Aucun de nos expatriés n’a demandé à rentrer. Au contraire, certains de nos salariés ont même écourté leurs vacances pour prêter main-forte à leurs collègues », raconte Evgeny Cherkassky, directeur financier de HOT, l’opérateur télécoms de Patrick Drahi dans le pays. Pour ceux qui restent, contrairement à la période du Covid où les règles de confinement étaient imposées par le gouvernement, c’est en général à eux d’estimer s’ils peuvent se rendre sur leur lieu de travail ou s’il vaut mieux qu’ils restent chez eux – sauf dans certaines zones particulièrement exposées. « De nombreux salariés sont en deuil ou connaissent des gens touchés. Il faut donc être flexible. Pour cela, le Covid a été un bon test », explique Evgeny Cherkassky. Face au choc, Patrick Drahi est lui-même venu apporter son soutien aux salariés de HOT à Tel-Aviv, dans un moment particulièrement émouvant. La mobilisation générale de 360.000 réservistes, soit plus de 11 % de la population active d’Israël, corse en outre l’organisation des entreprises. Sans compter la fermeture des écoles pour deux mois, qui oblige les familles à s’occuper des enfants durant la journée. « Plusieurs centaines de nos salariés ont été mobilisés. Cela nous oblige à travailler davantage et à choisir nos priorités. Il faut faire plus mais avec moins de monde », témoigne Evgeny Cherkassky. Certaines boutiques réduisent donc leurs heures d’ouverture, des restaurants ferment, tandis que certaines enseignes jonglent au contraire pour faire face à une explosion de la demande, notamment des personnes déplacées qui ont dû être relogées dans des hôtels. Decathlon croule de son côté sous les commandes de matériel de camping et de lampes frontales des habitants appelés par le gouvernement israélien à renforcer leurs équipements d’urgence. Chez HOT, le trafic sur ses réseaux fixe et mobile a été multiplié par deux. L’opérateur, qui compte 1,3 million d’abonnés, a basculé leurs forfaits en illimité pour qu’ils puissent s’informer et rester en contact avec leurs familles. Plusieurs dizaines de milliers de smartphones, chargeurs et cartes SIM ont également été offertes aux soldats. Les ports et les aéroports sont, de leur côté, restés ouverts, ce qui facilite les choses pour les groupes français. L’Agence européenne de la sécurité aérienne a publié une notification vendredi dernier, estimant que le risque pour la sécurité des vols était suffisamment bien géré par les autorités israéliennes pour permettre le maintien des vols depuis l’Europe. Chez Air France, les vols réguliers entre Paris et Tel-Aviv ont cependant été suspendus dès le 8 octobre, par mesure de sécurité. Les 11 salariés de la compagnie basés en Israël sont néanmoins restés sur place, « tous mobilisés pour assurer les rapatriements », indique un porte-parole. Les syndicats de navigants de la compagnie aérienne rappellent que la décision de poursuivre ou non un vol dans une zone dangereuse est de la compétence du commandant de bord. Tout salarié peut, par ailleurs, exercer son droit de retrait en cas de danger grave et imminent et refuser d’embarquer sur un vol à destination de Tel-Aviv. Les trajets restent en effet sous la menace constante de tirs de roquettes ou de missiles depuis la bande de Gaza ou depuis le Liban, qui ont plusieurs fois contraint des vols à faire demi-tour. Ceux qui concernent les rapatriements sont donc effectués par des équipages volontaires, en parfaite connaissance de cause ». Raphaël Balenieri, Ninon Renaud et Bruno Trévidic |