Israël est confronté depuis 2021 à un défi qui s’amplifie, celui du trafic transfrontalier de drogue et d’armes. Un israélien sur cinq serait toxicomane.
L’augmentation substantielle des saisies depuis 18 mois semble, en partie, symétrique aux différentes phases du conflit entre Tsahal et le Hamas ainsi que l’augmentation des règlements de compte au sein de la communauté arabe israélienne, plus de 154 victimes à date. Sur à peine moins de 500 attentats déjoués en Cisjordanie et à Jérusalem en 2022, les deux tiers concernaient la contrebande d’armes légères. De mars 2021 à avril 2023 on dénombre une centaine de tentatives de contrebande de stupéfiants ou d’armes dans le triangle Israël, Jordanie, Egypte. Comme toujours il faut ajouter la contrebande qui réussit, mais qu’on ne peut pas évaluer avec précision. On relève aussi que près de 20 % des tentatives proviennent également du Liban et de la Syrie( fabricant de stupéfiants). De plus, seuls sont connus les détails rendus publics dans les trois pays. Lors de l’opération de Jénine, Tsahal a découvert des centaines d’engins explosifs, des armes de type M16, des fusils et des quantités de produits chimiques destines à la fabrication d’explosifs.
L’afflux de drogues et d’armes créé un double problème, social et sécuritaire. Certaines populations, notamment d’origine bédouine, plus spécialement sur la frontière égyptienne, sont devenues trafiquants d’armes et de drogues.
Depuis le début de cette année l’armée indique avoir saisi plus de 300 armes et 2150 kg de drogue.
Les causes
Les hausses importantes de saisies, tant d’armes que de drogues coïncident avec la pandémie qui a mis à mal les moyens d’existence de certains résidents des zones frontalières où l’économie, souvent déjà fragile voire inexistante, est amplifiée par les conséquences du conflit en Ukraine. Ce qui a considérablement accru les tensions parmi ces minorités qui ont trouvé dans ces trafics la possibilité de se créer un revenu durable. Selon Tsahal, les passeurs égyptiens et bédouins peuvent encaisser des revenus mensuels de l’ordre de 25 000 à 35 000 dollars. De sorte que ces réseaux proposent des rémunérations attractives aux démunis sans emploi et la plupart du temps sans formation. Parallèlement, le confinement lors de la pandémie a été un point de bascule pour beaucoup de jeunes, qui ont cherché dans la consommation de drogues une forme de refuge et d’antidote aux multiples conséquences de la pandémie, inconnues jusque là. Pour toutes ces raisons, les autorités considèrent que la situation n’ira pas en s’améliorant.
Le défi
Il est double. D’origine transfrontalière. Il répond à une demande en hausse des consommateurs. Cette aggravation déclenche à elle seule un double combat : sécuritaire face à un flux permanent d’armes et d’explosifs dont l’objectif est de s’attaquer aux biens et aux personnes, civils et militaires, avec comme destination finale les terroristes et le milieu israélien, arabe et non arabe.
Dans la situation actuelle, les autorités s’attendent à ce que la contrebande transfrontalière reste un combat permanent. Eu égard à la porosité relative des points de passage, les experts indiquent que la frontière nord est mieux protégée que celle du sud, qui n’aurait pas bénéficié des mêmes mises à niveau. Ce qui semble être confirmé par le passage régulier d’armes. Pour autant la coopération avec les pays voisins devient essentielle devant un phénomène qu’ils ne veulent pas ou qu’ils sont incapables d’enrayer. L’arrestation récente d’un diplomate jordanien trafiquant d’armes à ses heures, illustre, si besoin était, la nécessité urgente d’une collaboration très étroite entre pays.
Si les flux augmentent à ce rythme c’est en raison de la demande. Ce qui constitue le front intérieur et une interrogation pour toute la société israélienne.
La synthèse d’un article publié le 16 octobre 2019 par Hagit Bonny-Noach, dans le Journal israélien de recherche sur les politiques de santé volume 8 , Numéro d’article : 75 par les services sanitaires fait le point qui prévalait à cette date, donc juste avant la pandémie.
Politique de réduction des risques en matière de drogues en Israël : qu’est-ce qui a été accompli et que reste-t-il à faire ?
La principale politique officielle en matière de drogue est l’approche traditionnelle de l’abstinence, de la probation et des mesures punitives basée sur trois piliers principaux : l’application, le traitement et la réadaptation, et la prévention. Cependant, dans le cadre du pilier traitement, Israël a adopté un certain nombre de services de réduction des risques, axés principalement sur les toxicos qui consomment de l’héroïne et ceux qui s’injectent des drogues. Ceux-ci comprennent le traitement d’entretien à la méthadone, le traitement d’entretien à la buprénorphine et les programmes d’échange d’aiguilles et de seringues. Des services plus spécialisés sont destinés principalement aux utilisateurs qui fréquentent la plus grande scène ouverte de la drogue à Tel-Aviv. Il s’agit notamment d’une clinique de santé, d’un appartement d’urgence pour les travailleuses du sexe toxicomanes et d’un centre « First Step ». Cependant, la problématique de la diminution du nombre de toxicomanes est restée controversée, stigmatisée, et est considérée comme une sous-catégorie pour le traitement d’abstinence totale.
Cet article suit l’évolution des interventions en vue de réduire le nombre de toxicomanes et met en lumière l’absence d’une politique nationale complète, bien planifiée et formelle. l’article complet exprime des inquiétudes quant à l’avenir incertain des politiques globales de traitement de la toxicomanie causées par les changements structurels liés à l’abolition de l’Autorité antidrogue, l’autorité statutaire et l’organe central qui promeut et coordonne toutes les politiques nationales, politique nationale de réduction des risques en matière de drogues.
Conclusion du rapport
Des recommandations sont proposées pour mettre en œuvre une politique globale de réduction des risques en matière de stupéfiants, dirigée par un groupe multidisciplinaire de décideurs dans tous les domaines de la politique en matière de drogues. Celles-ci se concentrent sur l’expansion et le développement de plus de services pour les patients sous traitement d’entretien aux opioïdes et les personnes qui s’injectent des drogues, ainsi que sur un effort national visant à réduire les niveaux élevés de stigmatisation et de discrimination à leur encontre, englobant d’autres substances courantes et en se concentrant sur des populations telles que les adolescents et les jeunes adultes qui s’engager dans d’autres types de consommation de substances telles que le cannabis, les stimulants de type amphétamine et les hallucinogènes.
Le rapport publié en mars 2023 par le centre TAUB confirme cette aggravation. Voici un extrait :
Une nouvelle étude rédigée par le professeur Nadav Davidovitch, le Dr. Yannai Kranzler et Oren Miron de mars 2023 présentent les faits concrets de la consommation de stupéfiants contre la douleur et ses effets destructeurs. En 2020, Israël a été classé numéro un mondial de la consommation d’opioïdes – les narcotiques contre la douleur, parmi lesquels le fentanyl, qui est 50 fois plus fort que l’héroïne – et a dépassé les États-Unis.Les chercheurs envisagent des mesures immédiates qui devraient être prises pour réduire la consommation et le surabondamment, y compris des alternatives plus sûres pour la gestion de la douleur, une meilleure accessibilité aux traitements médicaux, la santé mentale et les services sociaux, et la réduction de la stigmatisation liée à la consommation et à l’abus de drogues.
Des études montrent que la consommation ambulatoire d’opioïdes provient principalement de la consommation de fentanyl par des patients non âgés et hors traitements médicaux, chez des patients de faible statut socio-économique. Les différents rapports publiés par les autorités en charge, ne prennent pas en compte les morts survenues par overdose qui passent sous les radars. Ce qui s’explique largement par le faible nombre d’autopsies pratiquées pour des raisons religieuses, mais qu’on ne peut ignorer.
Quatre ans plus tard, même si des efforts ont été réalisés, les faits semblent confirmer que beaucoup reste à faire. Les mesures préconisées n’ont pas été suivies d’effet. Car l’augmentation continue des volumes saisies et ceux qui arrivent sur le marché sont autant de voyant rouges qui mettent en évidence l’urgence de combattre un mal qui vient frapper toutes les catégories, plus particulièrement les jeunes. On peut à juste titre accuser l’Iran, le Hezbollah, la Syrie et d’autres d’être les fournisseurs. A moins de rendre les frontières étanches, ce qui ne semblent pas réaliste, Il ne faut pas se tromper d’objectif, l’objectif prioritaire est en Israël. Fit aggravant, les toxicomanes ont besoin de ressources pour acheter les stupéfiants, ce qui se traduit aussi par une hausse de la criminalité. Les autorités doivent briser ce cercle vicieux infernal qui s’attaque à toute la société.