Perte de confiance en soi, reconversion dans le dog-sitting… Des personnes « ChatGPTisées » racontent leur ressenti au Washington Post (Ci-dessous). En Israël on en parle encore assez peu… mais cela va venir car ChatGPT balaye tous les secteurs.
SELON (1) : « La fin de l’humanité ou la fin du mois ? Dans certains secteurs, ChatGPT suscite une angoisse très immédiate : la peur de perdre son emploi. Cette dernière est encouragée par diverses prédictions plutôt pessimistes en la matière. 48 % des entreprises ayant adopté ChatGPT ont déjà procédé à des licenciements, assurait un sondage il y a quelques mois. N’hésitant pas à alimenter la peur à ce sujet, OpenAI (l’entreprise qui a créé le chatbot) estime que 80 % des emplois seront impactés par sa technologie. Des entreprises envisagent ouvertement le remplacement de certains métiers. IBM a ainsi annoncé début mai que 30 % de ses emplois administratifs pouvaient être exécutés par une IA, de quoi geler les embauches dans ce département. Sans parler des hustles bros de Twitter, qui nous assurent à longueur de journée que ChatGPT est un “salarié gratuit”. À condition bien sûr de suivre leurs conseils.
Alors que ressent-on lorsqu’on se fait effectivement remplacer par un robot conversationnel ? Le Washington Post propose une ébauche de réponses avec les témoignages d’un salarié et d’une indépendante. Tous deux sont des copywriters, ils écrivent pour des marques de courts textes de description de produits, des contenus pour leur site web. Une tâche qui sied à ChatGPT, capable d’imiter le langage humain avec une syntaxe et une orthographe impeccable (et un style plutôt plat).
Eric Fein, 34 ans, explique avoir vécu pendant 10 ans en écrivant des textes pour diverses marques… De quoi gagner 60 euros de l’heure. En mars, il a perdu son plus gros client. La raison ? L’entreprise dit ne plus avoir besoin de ses services car ChatGPT fait très bien l’affaire. Les 9 autres clients l’ont lâché dans la foulée pour la même raison.
Promeneuse de chien et réparateur de clim’
« Ça m’a anéanti », dit-il au média américain. Il a averti ses clients que ChatGPT ne pourrait pas rédiger des contenus avec son niveau de créativité, de précision technique et d’originalité. Chose que ces clients ont reconnue, tout en arguant que son salaire était bien supérieur à l’abonnement au robot (25 euros par mois). Un client a accepté de le reprendre, peu satisfait de ses premiers essais avec ChatGPT. Mais le trentenaire a dû se reconvertir dans la réparation de climatiseur pour gagner sa vie décemment.
Olivia Lipkin, 25 ans, s’est quant à elle fait remercier par son employeur après avoir été surnommée Olivia/ChatGPT sur la messagerie privée de l’entreprise. Licenciée en avril dernier, elle découvre après coup que c’est à cause de ChatGPT. « Chaque fois que les gens parlaient de ChatGPT, je me sentais peu sûre de moi et anxieuse à l’idée qu’il me remplacerait », dit-elle au média. « Aujourd’hui, j’ai la preuve que c’est vrai, que ces angoisses étaient justifiées et que j’ai perdu mon emploi à cause de l’IA », dit celle qui travaille désormais en tant que promeneuse de chien pour gagner sa vie.
Réalisation de prophétie autoréalisatrice
Dans ces deux cas, ce n’est pas « ChatGPT » qui a viré ces personnes, mais bien des employeurs ayant fait le choix de miser sur la réduction des coûts, quitte à perdre en qualité. Et celui de réaliser les prophéties autoréalisatrices dictées par les sociétés qui commercialisent ces systèmes. Peu importe que le chatbot ne soit pas fiable à 100 %, qu’il lui arrive d’inventer des faits, et que son style ne soit pas des plus originaux. Peu importe que les premières expérimentations de remplacement d’un métier par ChatGPT ne soient pas des plus heureuses. « Nous devons nous demander si un fac-similé est suffisant. L’imitation est-elle suffisante ? Est-ce tout ce qui nous importe ? », se demande la chercheuse Sarah T.Roberts, spécialiste du travail numérique dans les colonnes du Washington Post. « Nous allons abaisser la qualité, et dans quel but ? Pour que les propriétaires et les actionnaires de l’entreprise puissent prendre une plus grande part du gâteau ? »
Par ailleurs, l’automatisation de ChatGPT n’est pas totale. L’intelligence artificielle, comme toute autre, nécessite malgré tout une force de travail. Il y a quelques mois, une enquête du Time révélait que des travailleurs kényans étaient payés 2 dollars de l’heure pour réaliser le travail éprouvant de filtrage des productions de ChatGPT. L’entreprise pour laquelle ils travaillent n’a plus de contrat avec OpenAI, mais nul doute que d’autres s’occupent de faire ce même labeur. En préférant une IA plutôt qu’un salarié, c’est aussi ce travail mal payé et dur psychologiquement que les entreprises encouragent ».
(1) ps://www.ladn.eu/