Même si les jours de gloire du New York Times sont depuis longtemps derrière lui, quand le quotidien américain fait son édito de Une sur Israël, en Israël, on ne prend pas l’événement à la légère. Surtout quand l’éditorial est aussi alarmiste. Et la première salve est dans le titre : « l’idéal de la démocratie dans un Etat juif est en danger  » affirme la rédaction du NY Times, estimant que le futur gouvernement Netanyahou est une considérable menace pour l’avenir d’Israël, sa direction, sa sécurité et même pour l’idée d’un foyer national juif ».

Et le quotidien new yorkais s’inquiète de voir émerger un gouvernement qui pour la première fois marque  une rupture qualitative et alarmante avec tous ceux qui l’ont précédé durant les 75 ans d’histoire d’Israël ».

Si l’on peut comprendre que le New York Times s’inquiète de voir arriver au gouvernement israélien des partis ultranationalistes religieux qui pourraient effectivement induire un cap beaucoup plus droitier à la ligne politique du pays, le journal va peut-être un peu vite en besogne pour annoncer le pire. Et surtout, le quotidien américain semble avoir oublié d’autres prophéties de catastrophe qu’il a pu publier dans le passé sur l’avenir d’Israël. Notamment en 1977, lors de la première victoire de la droite israélienne conduite par le Likoud de Menahem Begin.

« L’ancien terroriste de l’Irgoun, messianiste adepte du Grand Israël » allait éloigner les perspectives de paix que la gauche israélienne et surtout le président Carter appelaient de leurs vœux. Le New York Times, traditionnellement proche du parti Démocrate, traduisait déjà à l’époque l’humeur de l’administration en place à Washington. Rien de nouveau, donc,  45 ans plus tard.

Et c’est d’ailleurs comme porte-parole de l’administration démocrate que l’on interprète en Israël les analyses ou les commentaires du New York Times sur la politique locale. Ce n’est pas seulement la ligne éditoriale d’un journal, c’est aussi un message de la Maison Blanche, adressé de telle manière qu’il évite l’incident diplomatique. C’est là que se joue la guerre d’influence et ce n’est pas un hasard si les dirigeants israéliens successifs se sont presque tous pliés à l’exercice de l’interview ou de la tribune dans les colonnes du New York Times dont ils savent qu’elles sont lues avec attention à la Maison Blanche ou au Département d’Etat. Naftali Bennett et Yaïr Lapid l’ont fait. Quant à Benyamin Netanyahou, ce n’est pas encore au New York Times, mais à une série d’autres médias américains qu’il accorde ses seuls entretiens depuis le scrutin du 1er novembre.

Par médias interposés, Israël et les Etats-Unis échangent avertissements, mises en garde ou messages d’apaisement. Car si les grands journaux et chaines de télévision n’ont plus l’impact d’autrefois sur le grand public, ils restent encore le meilleur canal de communication entre dirigeants politiques. Ce n’est donc pas seulement l’inquiétude des journalistes du New York Times qui s’est exprimée dans l’éditorial du 17 décembre, mais bien celle de l’administration Biden, qui ne sait toujours pas comment communiquer avec le futur gouvernement israélien, ni comment faire le tri entre les déclarations rassurantes de Benyamin Netanyahou et les annonces plus agressives de ses futurs ministres.

RADIO J

Pascale Zonszain

 

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