De l’an 19 et la déportation par Tibère de milliers de Juifs de Rome vers les mines de sel de Sardaigne et vers la Corse à l’arrivée en l’an 800, de nombreuses migrations Juives sont venues d’Egypte dans le sud de la Corse. Plus tard c’est l’arrivée de milliers de Juifs fuyant les persécutions à Naples et en Italie du sud qui s’installèrent dans des villages de montagne où certaines églises détiennent toujours des traces de documents rédigés en Hébreu. Puis il y eu les Juifs fuyant l’inquisition en 1492 qui arrivèrent de l’ile de Sicile et d’Espagne où tous furent accueillis avec bienveillance par la population locale.
Le fait historique le plus marquant date des années 1750 à 1769, lorsque le grand résistant homme politique et philosophe Pascal Paoli qui libéra la Corse de l’occupation Génoise proposa à des milliers de Juifs Italiens persécutés dans leur pays de venir s’installer dans l’Ile. Il prenait ainsi exemple sur le duc de Toscane qui fit la prospérité de la ville de Livourne en accueillant des réfugiés Juifs Portugais.
Ils créèrent le port franc de Livourne qui rayonna dans toute la méditerranée et au delà à Amsterdam ,Salonique ,Constantinople et jusqu’à Goa en Inde où s’étaient installés des Marranes Ibériques. La proximité entre les Corses et les Juifs Italiens était ancienne car les Juifs fabriquaient et vendaient des armes aux Corses alors en rébellion contre Gênes, en échange de corail.
Mais toutes ces migrations vers la Corse n’étaient pas encadrées par des rabbins et des chefs spirituels. Les Juifs ne purent maintenir une pratique religieuse. Surtout, l’accueil bienveillant et le non antisémitisme des Corses provoqua des mariages mixtes et une assimilation quasi complète. Reste que de très nombreux patronymes actuels en Corse rappellent leurs origines Juives. La liste serait très longue des Padovani originaires de la communauté Juive de Padoue à Yaacobi (Giacobbi) et autres noms hébreux etc. De même des noms de lieux comme Casalabriva (la maison de l’hébreu) ou le pont d’Abra (diminutif d’Abraham) etc.
Des droits égaux pour les Juifs en Corse.
Pascal Paoli prononça cette phrase célèbre : » Les Juifs ont les mêmes droits que les Corses puisqu’ils partagent le même sort » et ceci, trente ans avant la révolution française de 1789.
Beaucoup de Juifs voyaient en Napoléon, un nouveau Cyrus, car Napoléon Bonaparte ami de la famille de Pascal Paoli en 1806 convoqua selon ses propres mots les Etats généraux des Juifs pour faire des Juifs des citoyens utiles, concilier leurs croyances avec les devoirs des Français, éloigner les reproches qu’on leur a faits et remédier aux maux qui les ont occasionnés.
Le décret de 1806 libéra les Juifs et le Grand Sanhédrin en 1807 fit du judaïsme le troisième culte de France. Enfin par le décret de Bayonne du 28 juillet 1808, Napoléon imposa à tous les Juifs de l’empire de prendre « un nom définitif » devenant ainsi des citoyens à part entière.
« Je voulais libérer les Juifs ».
Napoléon émancipa aussi les Juifs du Portugal en 1811, d’Allemagne, des Pays Bas, de Suisse, de Mayence et Francfort, et d’une partie de l’Italie. A Ancône il abolit les bonnets jaunes et les brassards avec l’étoile de David pour les remplacer par les cocardes tricolores. Une initiative à l’heure où il faisait encore mauvais vivre sous l’inquisition d’origine espagnole. Les droits des Juifs qui ne survécurent pas à sa chute, sauf en France et en Hollande.
A son médecin à Sainte-Hélène Napoléon fit cette confidence : Je voulais libérer les Juifs pour en faire des citoyens à part entière, qu’ils bénéficient des mêmes droits que les catholiques et les protestants. Je voulais qu’ils soient traités en frère puisque nous sommes tous les héritiers du judaïsme. Par ailleurs, il voulait attirer en France les Juifs de tous les pays d’Europe où ils étaient persécutés.
A l’instar de Pascal Paoli, Napoléon plaçait la nation au sommet de son édifice mental. Et toujours avec cette idée que tous les hommes et donc tous les citoyens étaient égaux.
Napoléon le Corse et l’Etat Juif.
Certaines sources affirment que lorsque les Français assiégeaient Saint Jean d’Acre, Napoléon aurait proclamé le 20 avril 1799 qu’il souhaitait l’installation d’un état Juif indépendant autour de Jérusalem. il souhaitait inviter tous les Juifs d’Afrique et d’Asie à se ranger sous sa bannière en vue de rétablir un état Juif dans la province de Palestine. Mais les Turcs aidés par les Anglais empêchèrent Napoléon d’entrer en terre sainte.
Et puis, durant la première guerre mondiale les Turcs alliés des Allemands chassèrent 800 Juifs protégés Français de Haïfa et Tibériade. Ils furent recueillis par un navire Américain et errèrent en méditerranée avant d’être débarqués en 1915 à Ajaccio et à Bastia où ils trouvèrent enfin un refuge décent.
Pendant la seconde guerre mondiale les Juifs réfugiés en Corse ne furent jamais dénoncés ou déportés. Seul un juif fut tué suite à une malheureuse circonstance. La Corse fut le seul département Français pendant la seconde guerre mondiale à protéger ses habitants Juifs en déclarant aux autorités de collaboration et d’occupation qu’il n’y avait dans l’ile que des Corses !
En 1947 le sinistre préfet de l’époque Maurice Papon ne réussit pas à s’opposer à l’atterrissage en Corse d’avions tchécoslovaques remplis d’armes. Ils étaient en route pour fournir les combattants de la Haganah. Ceci grâce à la pression d’anciens résistants Corses amis des Juifs.
Il faut espérer enfin aujourd’hui que la Corse obtienne le titre tant mérité d’ÎLE DES JUSTES.