LES ANNEES BIBI. Laurent David Samama. « Avec une chanson efficace mais débile à souhait, la chanteuse Netta Barzilai remportait la 63ème édition du concours Eurovision de la chanson. Sa chanson, invitait alors à l’émancipation des femmes et faisait écho au mouvement #MeToo.
Bravo pour cela ! Pour le talent, par contre, il faudra repasser… Dès l’annonce de sa victoire, une curieuse vague de bonheur a déferlé sur Israël et la diaspora. Tout cela pour une chanson ultra-marketée chantée par une ex participante de télé-réalité dans un concours où l’altérité, le fait d’être femme, homosexuel, noir, juif, musulman, gros, maigre ou roux est devenu un moyen facile d’émouvoir les masses.
Vite, un vote pour celui qui ne nous ressemble pas ! Vite, une voix pour cet autrichien noir (tiens, quelle curiosité !), cette israélienne en surpoids (c’est si amusant !), ce moldave à paillettes, cette chypriote en fauteuil roulant. Quelle médiocrité, quelle indignité…
Sous-culture
Tout cela pourrait paraître anecdotique. Une victoire dans un divertissement populaire, à une heure de grande écoute. Il n’en est rien. La scène raconte mieux que n’importe quelle tribune comment Israël, par la faute de son Premier Ministre, s’enfonce peu à peu dans une médiocrité jusque ici étrangère à son glorieux héritage. Comment Netanyahu, en somme, banalise la bêtise, se trumpise, et, ce faisant, menace jusqu’à la survie de son pays…
Quelques minutes après l’annonce du résultat, Bibi s’est précipité sur son téléphone. Il a appelé Netta Barzilai pour lui dire, «de vive voix», qu’elle était «la meilleure ambassadrice d’Israël». Les mots sont choisis. Netanyahou ne parle ni d’Amos Gitai, d’Amos Oz, de David Grossman ou de Daniel Barenboim.
Il parle d’une gagnante de l’Eurovision… Son inénarrable ministre de la Culture, la droitière Miri Regev n’est pas restée en reste. Sur Facebook, la Sarah Palin israélienne, celle-là même qui parlait des migrants soudanais comme d’un «cancer», «pire que les djihadistes» et boycottait le festival du film israélien à Paris, écrivait : «Tu as apporté un cadeau merveilleux à Israël pour son 70e anniversaire et pour le 51e anniversaire de la réunification de Jérusalem». Si une victoire à l’Eurovision plonge le gouvernement israélien en pareille transe, on a peine à s’imaginer ce qu’il se passera en cas de prix Nobel, de Palme d’Or, d’Oscar… Comment cela, rien ? »
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