Le monde de l’art en deuil suite à la disparition de Dani Karavan.

Même si je n’ai jamais rencontré Dani Karavan, j’ai quand même l’impression de l’avoir connu. D’abord à travers sa fille que je suis sur Instagram depuis notre première rencontre. En lisant ses posts, j’ai fait la connaissance de Dani, ce grand artiste qui était son père, un vieux Monsieur malicieux qu’elle accompagnait pendant ses voyages et à qui elle rendait visite pratiquement chaque jour, même pendant la pandémie (son père et sa mère devant la porte, Tamar dans l’escalier, s’envoyant des messages toujours pleins d’amour et de chaleur). Les vidéos publiées par Tamar témoignent toutes de son admiration pour son père et de la profondeur de leur relation. Une relation père-fille à la fois vraie, belle et touchante. Aussi, lorsque j’appris que Dani Karavan était décédé samedi dernier, ma première réaction fut : oh mon D.ieu, Tamar. Elle doit être anéantie. Son cœur doit être brisé, ce cœur emoji que dans tous ses posts sur son père elle posait sur sa poitrine et sur la sienne.

Je suis allée sur sa page et j’ai lu : « S’il y a quelque chose que j’ai vraiment toujours espéré, telle une enfant refusant la réalité, c’est de n’avoir jamais besoin d’écrire que mon père n’était plus. Les mots me manquent pour dire quel père merveilleux il est et il fut et pour décrire la force du lien nous unissant. Il n’y a pas assez de larmes dans ce monde pour intégrer le fait que mon père, qui aimait tant la vie, n’est plus. Pour la plupart des gens c’était l’artiste Dani Karavan mais pour moi c’était mon père si tendre et drôle ».

Pour moi aussi, Dani Karavan c’était l’artiste. Lorsque je vis ses œuvres pour la première fois en 2008, lors de la grande rétrospective dans le Martin-Gropius-Bau à Berlin, je fus immédiatement séduite. Ce sont les artistes comme Dani Karavan qui ont ouvert mon esprit au monde de l’art, qui m’ont appris à aimer l’art, à aimer le fait qu’il nous amène à ressentir des émotions et à nous poser des questions, qu’il nous dispense joie et parfois aussi mélancolie. Certes, je conçois qu’il est plus facile d’apprécier l’art quand on est en bonne santé et correctement nourri, mais je suis convaincue dans le même temps que l’art répond à un besoin élémentaire. Il fait de nous des êtres humains. Nous respirons, mangeons, tuons à l’instar des animaux mais le fait que nous puissions nous immerger totalement dans une œuvre et en garder notre vie entière le souvenir fait de nous ce que nous sommes : des êtres humains. Je me souviens avoir visité en janvier dernier avec ma famille le monument du Néguev de Dani Karavan, la main de mes enfants dans les miennes. J’ai été frappée par la beauté irradiant à la fois force et douceur de cette œuvre remarquable. Je me rappelle combien je me suis sentie libre, aimée et défiée en ce lieu et cela grâce à un homme qui a consacré toute sa vie à l’art, nonobstant les difficultés, les déchirements intérieurs et la précarité financière.

J’éprouve un très fort sentiment de reconnaissance envers ces artistes qui mettent toute leur énergie à nous permettre d’éprouver toute une palette de sentiments, ces sentiments qui font de nous des êtres humains. Et concernant ce souvenir d’une belle journée ensoleillée de janvier, je remercie Dani Karavan dont l’œuvre brillera toujours pour nous d’un éclat particulier.

Dani Karavan, né le 7.12.1930 à Tel-Aviv et décédé le 29.05.2021 à Tel-Aviv Yafo était un sculpteur mondialement connu. Il a réalisé des œuvres monumentales dont certaines se fondent dans le paysage.

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