FRANCE. SHOAH. AUDREY PULVAR. Times of Israel : « En réponse à la polémique actuelle sur les réunions « non-mixtes » pour les personnes s’estimant victimes de racisme, Patrick Klugman, avocat, militant anti-raciste, ancien conseiller à la mairie de Paris et ancien président de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), a publié mardi une tribune dans Le Monde et sur le site du mouvement Ile-de-France en Commun.
Dans celle-ci, il défend Audrey Pulvar, candidate investie par le PS aux régionales en Ile-de-France, avec le soutien de la maire de Paris Anne Hidalgo dont elle est adjointe, qui avait estimé samedi, à propos des réunions « non-mixtes », qu’une personne blanche ne devait pas en être exclue mais qu’on « peut lui demander de se taire ». Ces propos lui ont valu les attaques de la droite et de l’extrême-droite, mais aussi des désapprobations à gauche.
Dans son texte, Patrick Klugman cite pour exemple les réunions de rescapés de la Shoah.
« Personne ne peut nier l’importance qu’a revêtue le témoignage de rescapés de la Shoah, à la fois dans l’appréhension de l’ampleur du crime que dans sa transmission », écrit-il. « Or, pendant des décennies, les rescapés survivants, qui finiront par accorder un temps et une énergie considérables à aller à la rencontre des collégiens et des lycéens, ne pouvaient pas parler, y compris à leurs propres enfants. Il n’y a que dans certaines amicales d’anciens déportés que la parole était libre, et libre d’ailleurs, pour chacun, de se comprendre sans avoir besoin de parler.
Ces réunions étaient fondamentales et elles ont sans doute contribué à forger plus tard la capacité de dire, de témoigner et de partager avec le plus grand nombre. L’exemple de la parole des rescapés de la Shoah illustre de manière éclairante le cheminement d’une parole d’un entre-soi où elle va être posée pour que plus tard elle puisse être appréhendée par tous. Ainsi, la réunion non mixte n’est pas une fin mais un outil qui peut être utile pour des victimes. Cette distinction est essentielle. »
Audrey Pulvar est revenue elle aussi mardi dans une tribune publiée dans Le Monde sur sa déclaration du week-end, estimant qu’il fallait « écouter », plutôt que « se taire », avant « de prendre la parole ».
« J’ai évoqué la possibilité que d’autres militants ou citoyens qui ne sont pas victimes de racisme participent [aux réunions ‘non-mixtes’], sans difficulté, mais à condition (…) d’être d’abord dans une écoute bienveillante de la parole des personnes discriminées », a écrit Audrey Pulvar.
« J’ai utilisé le verbe ‘se taire’, parce que c’est généralement ce que l’on fait, quand on veut réellement écouter l’autre, avant ensuite de prendre la parole », affirme encore la candidate selon laquelle « d’aucuns y ont vu une forme de sommation au silence. À tort ».
« À celles et ceux que ma formulation a pu heurter, en leur donnant la sensation que je voulais d’emblée les exclure, je veux dire ici que tels n’étaient ni mon propos, ni mon intention », plaide l’adjointe à l’alimentation durable à la mairie de Paris.
« Jamais je n’ai dit vouloir réduire au silence une partie de la population, pour quelque motif que ce soit, et encore moins pour sa couleur de peau. Jamais je n’ai prononcé, ni conçu les mots ‘les blancs doivent se taire’ (…) », martèle l’ancienne journaliste, d’origine martiniquaise.
La présidente de l’Unef, Mélanie Luce, avait évoqué la semaine dernière l’organisation de réunions « non-mixtes » pour « permettre aux personnes touchées par le racisme de pouvoir exprimer ce qu’elles subissent ».
Si « ces groupes n’avaient pas ma préférence », indique Audrey Pulvar, « je peux concevoir, entendre, la nécessité pour des personnes discriminées (…) de se retrouver ‘entre-elles’, pour échanger, se rasséréner, trouver ensemble les moyens de se protéger d’autres exactions ».
La gauche embarrassée
Ce mercredi, la maire PS de Paris Anne Hidalgo a estimé qu’Audrey Pulvar avait « réparé » ses propos. « Je ne pense pas qu’Audrey Pulvar fasse partie de la gauche indigéniste et racialiste », a-t-elle déclaré sur RMC/BFMTV. À Jean-Jacques Bourdin qui lui demandait si on pouvait demander à une personne blanche de se taire dans ces réunions, comme évoqué par Mme Pulvar sur la même antenne samedi, Anne Hidalgo a répondu : « évidemment non » et indiqué « l’avoir dit » à son adjointe. « Je vis dans une société mixte : je veux que tous, hommes, femmes, quelle que soit l’orientation sexuelle, quelle que soit la pigmentation de la peau, on soit des enfants de la République », a déclaré l’élue socialiste, candidate potentielle à l’élection présidentielle de 2022.
Avant la mise au point d’Audrey Pulvar et la défense de Patrick Klugman et d’Anne Hidalgo, la phrase prononcée samedi sur BFMTV avait valu à l’ancienne journaliste de nombreuses critiques, après un début de campagne marqué par les accusations de pédocriminalité visant son père décédé en 2008.
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin s’est dit mardi matin « profondément choqué » par les dires de Mme Pulvar, selon lui « contraires au pacte républicain », et lui avait demandé de « corriger ses propos ».
Pour Valérie Pécresse, présidente (Libres !) de l’Ile-de-France, « il n’y a pas de racisme ‘acceptable’ ». Et la présidente du RN Marine Le Pen a réclamé à l’encontre de Mme Pulvar « des poursuites pour provocation à la discrimination raciale ».
À gauche, alors que le premier secrétaire du PS Olivier Faure a renouvelé mardi son soutien à Audrey Pulvar pour les régionales, tout en estimant qu’elle avait prononcé « une phrase malheureuse », les marques de soutien les plus affirmées sont venues de La France Insoumise.
Les Verts ont conservé leurs distances, Eric Piolle appelant la gauche « à ne pas se laisser entraîner dans un débat dont personne ne sera vainqueur », tandis que Yannick Jadot jugeait l’expression d’Audrey Pulvar « très maladroite ».
Le patron du PCF Fabien Roussel a lui clairement rejeté « les réunions segmentées selon la couleur de sa peau, sa religion ou son sexe » qui « divisent le combat ». »
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