Eurosatory / CCFI : leçon de Droit pour les ONG pro-palestiniennes

René ALLOUCHE

 

Alors que des associations pro-palestiniennes ont tenté, avec le concours de Ramallah via l’association « Al Haq » dont le siège est sis dans cette ville, d’interférer dans les affaires gouvernementales françaises voire de s’y substituer au moyen d’une action judiciaire devant le Tribunal de Bobigny, la Chambre de Commerce France Israël, (CCFI), association de droit français décide de contre attaquer en initiant une procédure devant le Tribunal de Commerce de Paris.

Chronologiquement, les associations pro-palestiniennes ont quelques jours d’avance. Elles demandent en référé au juge de Bobigny :

  • De faire interdiction, de fait, à tout israélien en visite d’entrer au Salon Eurosatory organisé par la société Coges Events, considérant que les autorités françaises ne sont pas allées assez loin dans leur interdiction faite aux sociétés israéliennes d’y détenir un stand. Cette demande a été agréée par le tribunal au motif que la décision gouvernementale s’inscrit bien dans continuité de l’ordonnance de la Cour internationale de Justice du 24 Mai 2024. Partant, ce sont toutes les sociétés israéliennes susceptibles d’intervenir comme courtier ou leur intermédiaire qui doivent être bannies du Salon.

 

  • Et, pour comble d’audace, de faire la police elles-mêmes au sein du Salon pour aller à la chasse aux israéliens « contrevenants », ce que les juges ont eu la pudeur de ne pas accorder aux demandeurs.

La décision du 14 juin 2024 du tribunal de Bobigny, pourtant incompétent pour modifier la décision gouvernementale laquelle relève de la sphère publique, n’a pas résisté à la sagacité des juges de la Cour d’appel de Paris, saisie par la société Coges et la CCFI, intervenante volontaire. En date du 18 juin 2024, la Cour a, purement et simplement, infirmé la décision dudit Tribunal, au motif qu’il n’appartient pas au juge judiciaire de compléter une décision politique qui a la nature d’un acte de gouvernement en relation avec la conduite des relations internationales de la France.

Au reste, le Ministre des Armées, Sébastien Lecornu, avait déjà fait part de son étonnement de voir les juges interpréter de façon extensive la décision des autorités administratives et indiqué que « l’exécutif n’a pas à commenter une décision de justice, mais force est de constater que cette dernière va bien au-delà de la demande initiale du gouvernement, qui n’a jamais formulé une telle interdiction. L’appel des organisateurs de cette décision de justice est donc une bonne chose », avait-il affirmé.

Dans la foulée de cette action sans fondement desdites ONG, la CCFI se lance donc dans la bataille judiciaire, non pas devant le tribunal de Bobigny mais devant le Tribunal de Commerce de Paris, de même qu’elle accompagne Coges dans son appel précité devant la Cour parisienne.

Sur le plan de la forme, c’est au regard de l’article 3 de ses statuts qui stipulent que l’un de ses objets est “d’entreprendre toutes actions, notamment en justice, pour lutter contre toutes formes de discrimination” que la CCFI, forte de son intérêt à agir, engage cette procédure devant la juridiction consulaire parisienne.

La CCFI est intervenue dans cette affaire pour faire juger que la société Coges ne pouvait, en aucun cas, priver les sociétés israéliennes d’exposer leur matériel de défense à ce salon, (ce qui, par ricochet, impliquait l’impossibilité d’empêcher les israéliens de se présenter à ce salon comme visiteurs), alors même que Coges arguait qu’elle agissait en vertu d’une décision gouvernementale.

Contrairement aux ONG pro palestiniennes, qui ont tenté de se substituer aux pouvoirs publics pour obtenir une modification du champ d’application d’une décision gouvernementale devant une juridiction civile, la CCFI a soulevé devant les juges consulaires l’argument de la discrimination dans le domaine commercial, posée par l’article 225-1 et suivant du code pénal pour combattre l’interdiction principale faite aux sociétés israéliennes de disposer d’un stand au sein du Salon.

Le décor juridique est ainsi planté. 

Que dit l’article 225-1 du code pénal ?

L’article 225-1 du code pénal dispose que :

« …Constitue également une discrimination toute distinction opérée entre les personnes morales sur le fondement de l’origine […] de l’appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée des membres ou de certains membres de ces personnes morales. »

En l’espèce, le tribunal de Commerce statuant en référé en date du 18 juin 2024 quelques minutes avant l’audience devant la Cour d’appel de Paris, décide  que les mesures mises en œuvre par COGES à compter du 31 mai 2024 opèrent bien une distinction entre les personnes morales déclarées comme israéliennes, ainsi que leurs filiales, et les autres personnes morales ayant formulé une demande de disposer d’un stand sur le salon et qu’il est incontestable que cette distinction est fondée sur l’appartenance de ces personnes morales à une nation. 

En conséquence de quoi, le tribunal confirme « que les mesures mises en œuvre par COGES à compter du 31 mai 2024 constituent bien une discrimination telle que définie à l’article 225-1 du code pénal ; que de surcroit, ces mesures consistent à refuser la fourniture d’un service aux personnes morales discriminées et à entraver l’exercice normal de leur activité économique ».

Ces mesures sont donc des mesures illicites et pénalement répréhensibles et provoquent bien un trouble manifestement illicite qu’il convient de faire cesser.

Mais alors, quelle était la portée de la décision gouvernementale, eu égard les dispositions pénales auxquelles seraient soumises la société Coges, société de droit privé ?

 

C’est sur ce point principalement que se joue la partie.

Le tribunal note qu’il n’est pas contesté que ni l’État d’Israël, ni ses ressortissants, ni ses entreprises ne font l’objet d’une mesure d’embargo en vigueur en France, qu’elle soit tirée du droit français ou des normes internationales auxquelles la République française est tenue.

De surcroît, en prenant cette décision le 31 mai, Coges Events avait expliqué devant le Tribunal certes agir sur « décision des autorités gouvernementales » dans le contexte des opérations militaires israéliennes à Gaza, mais n’a jamais pu prouver une décision administrative de la tutelle, a expliqué Me Klugman, avocat de la CCFI.

Il semblerait que plus personne n’ait voulu ou pu au sein des autorités, confirmer au plan juridique cette décision.

Il faut ici noter que la société Coges a déclaré s’en remettre à justice suite à son assignation par la CCFI et qu’elle s’est empressée de faire appel du jugement de Bobigny, appel dont le ministre des Armées français s’est réjoui.

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Cette leçon de droit fera jurisprudence face à tous ceux qui tenteront à nouveau de substituer le mensonge à la vérité.

La force de la loi est là pour rétablir la réalité. Jamais, comme l’ont laissé entendre les ONG devant les juges de Bobigny, la Cour Internationale de justice n’a condamné Israël pour génocide ni même ordonné l’arrêt de l’action militaire à Rafah sauf si celle-ci présentait un risque de génocide (Ordonnance du 24 Mai 2024 de la CIJ).

Ces ONG ne sont pas à leur premier coup d’essai dans le domaine judiciaire français.  Certaines d’entre elles avaient, par exemple, déjà tenté leur chance et perdu leur procès, par ignorance, incompétence ou haine d’Israël, dans une aventure judiciaire en France engagée devant la cour d’appel de Versailles contre la société Alstom, à propos de la concession du tramway de Jérusalem (22 mars 2013 Troisième Chambre).

Elles seront toujours en échec dès lors que le Droit trouvera à s’appliquer dans les domaines de la discrimination, de l’appel au boycott ou tout autre domaine qui constituerait un obstacle à la liberté du commerce et de l’industrie, telle que définie par l’Organisation Mondiale du Commerce : Principe de la nation la plus favorisée et du traitement non discriminatoire par les Membres et entre eux.

 

 

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