La Commission européenne a indiqué lundi qu’elle travaillait à l’élaboration d’un passeport vert permettant de voyager plus librement au sein de l’UE. L’exemple d’Israël, référence en la matière, révèle les atouts est les faiblesses de ces dispositifs.
La Commission européenne va présenter le 17 mars un projet de « passeport vert » numérique qui permettra à ses détenteurs de prouver qu’ils ont été vaccinés ou ont subi un test négatif récent.
Lundi, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a indiqué que cette innovation devrait « permettre graduellement aux Européens de se déplacer en sécurité au sein de l’UE ou en dehors, pour le travail ou du tourisme ». Après sa présentation, la proposition sera soumise au sommet des Vingt-Sept, le 25 mars prochain.
En Israël, deux passeports pour retrouver une vie normale
Sur ce sujet, Israël fait actuellement figure de référence, dans la foulée d’une campagne de vaccination éclair. Le pays a déjà administré plus de 8 millions de doses : plus de 50% des habitants ont reçu une première injection et 37% la seconde. Alors le pays a mis en place deux outils pour accompagner la levée progressive des restrictions :
Un « pass » rouge ou vert. Le premier est destiné aux personnes qui n’ont pas encore été vaccinées ou immunisées par une infection récente, tandis que le second est réservé aux personnes qui cochent l’une de ses deux caractéristiques. Depuis le 21 février, les centres commerciaux, les bibliothèques, les musées, les cafés et certains lieux de culte sont ouverts à tous. Mais les salles de sport, les événements sportifs et culturels ainsi que les restaurants ne sont ouverts qu’aux détenteurs du « pass » vert.
Un passeport vert. Sur le même modèle que le « pass », il permet aux personnes qui ont reçu les deux doses du vaccin de voyager puis de rentrer en Israël sans aucune restriction, mais en présentant toutefois un test négatif au Covid-19. Fin janvier, le gouvernement avait suspendu les vols internationaux vers et à destination d’Israël, qui devraient reprendre le 6 mars.
En Europe, un passeport et trois informations
La proposition d’Ursula von der Leyen reprend l’idée du passeport israélien. Il intégrerait une « preuve que la personne a été vaccinée », des « résultats de tests pour ceux qui n’ont pas encore pu se faire vacciner » et même l’indication que la personne a été immunisée après une infection.
Mais l’exemple d’Israël met en relief les nombreux défis à relever pour mettre en place un tel système. Accélérer la campagne de vaccination n’est que le premier d’entre eux.
Sur ce point, l’Europe est à la traîne : 33 millions de doses seulement ont été administrées au sein des Etats-membres, moins de la moitié du total américain (74 millions), par exemple, alors que les Etats-Unis comptent moins d’habitants.
Parmi les pays qui pressent pour l’adoption d’un passeport vert, la Grèce est en première ligne.
Le pays espère en effet sauver sa saison estivale, or personne ne peut dire quel niveau de couverture vaccinale sera atteint en Europe à cette période. De ce fait, le passeport vert européen pourrait reposer davantage, dans les prochains mois au moins, sur un résultat de test négatif.
La Commission européenne a annoncé avoir acheté « plus de 20 millions de tests rapides antigéniques », distribués dès la semaine prochaine. Elle a aussi lancé un appel d’offres portant sur quelque 550 millions de tests rapides livrables dans les « prochains mois » et incité les Etats-membres à passer commande.
Des écueils à éviter en Europe
Par ailleurs, l’expérience israélienne a fait surgir d’autres défis et inquiétudes.
Le premier est celui de la confidentialité des données et donc de la préservation du secret médical.
Un passeport de ce type pose aussi des questions de sécurité. Selon le quotidien Haaretz, la société de cybersécurité Check Point a pointé des failles dans le certificat de l’application israélienne. Il serait ainsi aisé de falsifier ses données afin d’obtenir un QR code valide. Selon les médias israéliens, certains se vendent déjà sur Internet.
Ces passeports peuvent également générer des inégalités entre les populations et les Etats-membres en fonction de l’avancée des campagnes vaccinales. Par ailleurs, la vaccination n’est pas obligatoire mais un tel projet pourrait être interprété comme un moyen détourné pour la généraliser. En décembre, en France, un projet de loi avait provoqué une levée de bouclier, l’opposition accusant le gouvernement d’avoir cette objectif.
Avec l’Allemagne, la France est d’ailleurs l’un des pays européens les plus prudents, ces derniers mois, sur le sujet du passeport vaccinal. « Tout le monde n’a pas encore accès au vaccin, et on ne sait pas s’il empêche la transmission », indiquait en janvier le ministre de la Santé, Olivier Véran, jugeant le débat envisageable « dans quelques mois ».
La création d’un passeport vaccinal n’aurait, en tout cas, rien de nouveau. De nombreux pays exigent déjà qu’une preuve de vaccin (contre la fièvre jaune, par exemple) soit présentée par tous les arrivants. A ce titre, de nombreux Français ont déjà un certificat international de vaccination pour voyager, et pas seulement à l’étranger. La Guyane demande en effet à tous les touristes (même français donc) d’être immunisés contre la fièvre jaune.
En France, Emmanuel Macron doit par ailleurs tenir cette semaine une réunion avec des membres du gouvernement pour préparer la mise en place d’un « pass sanitaire », qui ne sera pas un « passeport vaccinal », en vue de la réouverture des lieux culturels et des restaurants, indique l’AFP. Un signe que les lignes bougent sur ce sujet?

Source Le journal du dimanche

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