Des voix arabes pour le Likoud ? En mars 2020, la Liste Arabe Unifiée avait obtenu 15 sièges à la Knesset. Le meilleur score pour la représentation des députés arabes israéliens au parlement.

Dix mois plus tard, si l’on se fie aux sondages, la Liste Arabe a perdu un tiers de ses forces dans les intentions de vote, puisqu’elle n’est plus créditée que de dix mandats.

La paralysie politique qui a conduit à de nouvelles élections anticipées pour le mois de mars, a aussi impacté l’électorat arabe israélien. Il reproche à ses élus de ne pas avoir exploité la situation pour faire avancer les intérêts du secteur arabe. Au moment où les grands partis se déchiraient pour la formation d’une coalition, la Liste Arabe aurait eu une carte à jouer, en offrant un soutien parlementaire, en échange de mesures qui auraient permis à la population arabe de sortir de la crise structurelle qui la frappe depuis des années. Mais les députés arabes n’ont pas voulu sauter le pas.

Cela fait une quarantaine d’années que l’électorat arabe israélien vote massivement pour les partis de son secteur, qui de leur côté continuent à privilégier leur attachement à l’identité nationale palestinienne, plutôt que de représenter concrètement leurs élus à la Knesset. Mais ce comportement de l’électorat arabe semble évoluer. Deux facteurs en sont la cause. D’abord la violence qui mine la société arabe de l’intérieur. Avec une centaine de victimes de crimes de sang en 2020, le secteur arabe affiche un bilan disproportionné par rapport à son rapport démographique dans la population israélienne. Sans compter les agressions, les vols et le racket qui le plongent dans une insécurité permanente.

Et puis la crise sanitaire a encore aggravé la situation. Face à l’épidémie de Covid, ce sont surtout les élus locaux qui se sont montrés particulièrement réactifs et ont coopéré avec les pouvoirs publics et les autorités de santé pour freiner la contagion dans le secteur arabe.

Cela dit, un des quatre partis qui composent la Liste Arabe, le parti islamiste Raam, dirigé par Mansour Abbas, se montre depuis quelques mois plus disposé à coopérer au niveau national, au point de ne pas exclure un rapprochement avec le Likoud. Il ne faut évidemment pas chercher un réveil sioniste du côté de ce parti idéologiquement proche du Hamas, mais plutôt le pragmatisme politique de son leader, qui voit une opportunité de gagner en influence sur la scène nationale, tout en proposant des solutions concrètes aux difficultés de son secteur. Et surtout de prendre la direction de la Liste Arabe Unifiée.

Mais l’électorat arabe israélien semble se lasser des divisions intérieures de sa direction politique et semble aussi moins réticente à regarder du côté des partis sionistes, ce qu’ils auraient à leur proposer. Presque tous les partis en lice pour le scrutin du 23 mars cherchent activement à ajouter leur candidat arabe sur leur liste et tenter de pénétrer l’électorat arabe israélien. Ce n’est pas un hasard si depuis le début du mois, Benyamin Netanyahou a placé plusieurs localités arabes sur sa tournée des centres de vaccination. Mardi, le Premier ministre a même organisé une véritable allocution au public arabe lors de sa visite à Nazareth. Tandis qu’à l’extérieur, des élus de la Liste Arabe manifestaient contre sa présence. Le patron du Likoud sait qu’il pourrait trouver un peu plus de deux mandats auprès des électeurs arabes, selon de récents sondages. Rien d’étonnant à ce que cette offensive de charme inquiète la Liste Arabe Unifiée.

Pascale Zonszain (Radio J)

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