Un article de Agora (extraits uniquement). Il y a moins d’un an, un des vice-présidents de la Réserve Fédérale américaine rejoignait le centre de recherche de BlackRock (le BlackRock Investment Institute). Ce dernier intégrait le numéro un des gestionnaires d’actifs, quelques mois seulement après avoir démissionné de son poste au sein de la banque centrale étasunienne. Cet homme a l’allure svelte et au regard vif malgré ses 76 printemps, se nomme Stanley Fischer.

Attardons-nous donc un instant sur le profil de cette prestigieuse recrue de BlackRock. Élément intéressant, Fischer est né sur le continent africain, plus précisément dans la ville de Mazabuka en Zambie. Ce dernier est issu d’une famille juive résidant dans l’ancienne Rhodésie du Nord. La Zambie était à l’époque une colonie britannique, elle obtint son indépendance au cours de l’année 1964.

Fischer est donc né au milieu du second conflit mondial, en 1943, dans le monde colonial britannique dans la capitale zambienne : Lusaka. Au lendemain de la guerre, dans les années cinquante, sa famille part pour une autre colonie britannique : la Rhodésie du Sud (aujourd’hui le Zimbabwe).

En théorie, Fischer disposait de la citoyenneté britannique, mais ce qui est certain c’est que dès son adolescence Fischer va s’impliquer activement au sein d’un mouvement de jeunesse sioniste dénommé Habonim.

En 1960, dans le cadre de ce militantisme sioniste, il voyagea en Israël et étudia l’hébreu dans un kibboutz. Celui-ci prévoyait alors de commencer ses études à l’Université hébraïque de Jérusalem, mais il émigra finalement au Royaume-Uni, après avoir reçu une bourse de la prestigieuse London School of Economics. Après son cursus universitaire britannique, Fischer ne retourna pour autant en Israël. Il traversa cette fois l’Atlantique pour se rendre aux États-Unis pour étudier au MIT afin d’y obtenir un doctorat.

Au début des années 1970, Fischer entama alors une carrière de professeur agrégé à l’Université de Chicago. C’est au sein de cette grande université, fondée en 1890 par John D. Rockefeller, qu’il commença son activité professionnelle d’universitaire. Fischer enseigna naturellement au sein du département d’économie désigné comme l’École de Chicago (qui a d’ailleurs donné son nom à une école de pensée économique se rattachant à une vision néolibérale de l’économie).

L’une des premières «  consécrations politiques  » de sa carrière arrive au tournant de l’année 2005 ou Fischer est nommé gouverneur de la Banque d’Israël par le cabinet israélien, après avoir été recommandé par le Premier ministre Ariel Sharon et le ministre des Finances Benjamin Netanyahu. Évidemment entre temps, Fischer a pris la nationalité israélienne sans pour autant renoncer à sa citoyenneté américaine. D’ailleurs, il est à noter que Fischer avait déjà travaillé en collaboration avec la Banque d’Israël par le passé. Il avait notamment conseillé le gouvernement américain sur le programme de stabilisation économique d’Israël en 1985.

Sous sa direction, en 2010, la Banque d’Israël fait des merveilles dans un contexte de crise économique mondiale. Elle se classe même au premier rang des banques centrales grâce à son fonctionnement efficace, selon le World Competitiveness Yearbook d’IMD. Le régulateur Fischer fait l’objet de multiples éloges internationaux saluant sa gestion de l’économie israélienne au lendemain de la crise financière mondiale. En effet, en septembre 2009, la Banque d’Israël était la première banque du monde développé à relever ses taux d’intérêt…

Au cours des années 2009, 2010, 2011 et 2012, Fischer a même reçu une note «  A  » sur le bulletin de la banque centrale publié par le magazine Global Finance. En octobre 2010, Fischer est également déclaré gouverneur de l’année de la banque centrale par le magazine Euromoney. Fischer est donc au début de la décennie 2010 l’une des grandes «  stars  » des principaux banquiers centraux. Mais c’est aussi à cette période qu’il va connaitre son seul échec notable dans sa carrière.

En effet, sa candidature au poste de directeur général du FMI en remplacement de Dominique Strauss-Kahn est rejetée en 2011. Fischer ayant dépassé la limite d’âge nouvellement instituée par le FMI (67 au lieu de 65 ans). Le 30 juin 2013, à son zénith, Fischer finit tout de même par démissionner de son poste de gouverneur de la Banque d’Israël à mi-chemin de son deuxième mandat.Et c’est ainsi que six mois plus tard, cas unique dans l’histoire, le président démocrate Barack Obama le nomme vice-président du Federal Reserve System (FED). Avant lui, aucun grand banquier central n’avait été nommé au sein de deux grandes banques centrales. Même s’il est binational (Israélo-américain), ayant joué un rôle fondamental pendant 8 ans dans la politique israélienne, il aurait pu être identifié, aux yeux de l’opinion publique, comme une personnalité israélienne.

Mais en nommant Fischer à ce poste, Obama appliquait des consignes. Il déclara pompeusement à cette occasion que Fischer avait déjà apporté des décennies de leadership et d’expertise à travers ses différentes missions au sein du Fonds monétaire international et à la Banque d’Israël. Ce fut également à cette occasion que la timide Janet Yellen devint la première femme présidente de la Réserve fédérale au début de 2014.
Néanmoins après trois ans d’activité, Fischer démissionna pour des raisons personnelles à la mi-octobre 2017, 8 mois avant la fin de son mandat de vice-président en juin 2018. En réalité, il ne cachait pas son hostilité à Donald Trump. Et déclarera même plus tard que le président Trump «  ne comprend pas le commerce international  ».

Et c’est ainsi qu’à peine plus d’un an après avoir quitté la vice-présidence de la Réserve Fédérale, Stanley Fischer intégra la société BlackRock, géant américain de la gestion d’actifs. L’ancien banquier central est depuis moins d’un an, conseiller senior de l’institut de recherche de BlackRock. «  Son expérience et son expertise aideront nos investisseurs et nos clients à saisir l’impact des développements mondiaux sur leurs portefeuilles  », selon Larry Finck (directeur général) et Philipp Hildebrand (vice-président) dans le communiqué interne au début de l’année 2019.

https://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/banque-d-israel-fed-et-blackrock-221198

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