Média & Pub. Un exemple de campagne de pub débile? Israël a un bon exemple.

Par |2019-03-06T18:03:51+01:006 Mar 2019|Catégories : ECONOMIE|

Chronique sur la société israélienne. Une récente campagne d’affichage utilise à des fins satiriques l’image du chef du Hezbollah libanais… pour inciter les Israéliens à recycler.

Drôle d’ambiance sur le périph de Tel-Aviv. A huit semaines des élections, les panneaux publicitaires autoroutiers, que les automobilistes coincés dans les bouchons ont tout le loisir d’admirer, ont pris une connotation politique de plus en plus outrancière. Il y a d’abord eu les visages des journalistes «qui veulent décider l’élection à la place du peuple», placardés à la Usual Suspects par le Likoud. Puis l’œil bleu gris façon «plomb durci» du général Benny Gantz et, enfin, le couple star Donald Trump et Benyamin Nétanyahou, s’étalant sur les immeubles tout sourire.

Le dernier visage apparu ainsi en géant est le plus étonnant : Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah libanais, celui qui a juré la perte d’Israël. Le croque-mitaine candidat ? Pas du tout. Au-dessus de son visage, dessiné dans un style BD, on peut lire : «Je ne recycle pas les bouteilles.» Et, plus bas, la légende : «Nasrallah est coincé dans un bunker depuis douze ans. Et vous, quelle est votre excuse ?»

Seuls 22 % des déchets sont recyclés

La campagne, jugée par certains d’un goût douteux, est l’œuvre de la compagnie israélienne de collecte des déchets ELA. En sus, des vidéos détournant des archives du leader de la milice chiite relaient le même message. Selon un récent rapport, seul 22 % des déchets sont recyclés en Israël. Un chiffre en timide augmentation mais qui n’explique pas comment Nasrallah, dont les apparitions publiques sont devenues rarissimes depuis le second conflit israélo-libanais en 2006, est devenu une mascotte écolo-satirique. Et il ne s’agit pas d’une première. Depuis une décennie, résidents d’Haïfa et militants écologistes se mobilisent pour réclamer le démantèlement d’immenses cuves d’ammoniac installées sur le port de la ville.

Face à l’apathie du gouvernement, le meilleur argument pointant leur dangerosité leur a été fourni par Hassan Nasrallah en personne, qui, en 2016, a menacé de les bombarder en cas de nouveau conflit. «Cela aurait le même effet qu’une attaque nucléaire. On peut même dire qu’avec ça, le Liban détient la bombe atomique», avait-il menacé. Et les militants de défiler avec des pancartes : «Il n’y a qu’un leader qui nous accorde de l’importance : Nasrallah» ; «Heureusement que Nasrallah pense à nous !». Ou encore : «Si vous ne vous occupez pas du problème, Nasrallah s’en chargera.»

Ce que montre aussi cette campagne, c’est comment Hassan Nasrallah, bien qu’invisible, hante toujours la psyché israélienne. Peut-être plus que les leaders du Hamas ou le général iranien Qassem Soleimani, pourtant bien plus souvent désignés comme menaces par les politiciens israéliens ces dernières années que l’homme au turban. «Il reste l’épouvantail qui fait peur aux gens, nous glisse un ami franco-israélien. Celui dont on suit toujours les discours avec attention, qu’on redoute, car on sait qu’il tient généralement parole…» Reste à voir si la peur mêlée d’ironie pousse à se rendre au bac de recyclage.

Guillaume Gendron Correspondant à Tel-Aviv

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